What
‘‘Ideas-about-Science’’ Should Be Taught in
School Science?
"Teaching the nature of science needs to become
a core rather than a marginal part of the science curriculum"
Master 2 ESVT
- IUFM de Bourgogne - Module UE1
Enseigner les SVT : transposition didactique, épistémologie
et histoire des sciences
Master 1 EEEP
- IUFM de Bourgogne - Module UE1
Seminaire de recherche : Epistémologie et didactique des sciences
Benoît
Urgelli
last
up-date : 27 février, 2012
La
pratique de démarches historiques dans l'enseignement des sciences
[...]
through sets of well-chosen case studies
of either a historical or contemporary nature
and by more explicit reflection and discussion of the nature
of science [...]
Histoire
des sciences et enseignement scientifique
Depuis
plus de 150 ans, l'histoire des sciences, des savants et de leurs découvertes
est revendiquée comme un auxiliaire pour l'enseignement scientifique.
Dès 1850, l'étude de cette histoire est présentée
commun un moyen de développer l'esprit d'invention des jeunes,
leur culture générale et de collaborer avec d'autres disciplines
scolaires à l'histoire des humanités. A partir de la réforme
de 1902, les concepteurs de programme soutiennent que l'histoire des
sciences permet d'illustrer la méthode scientifique et possède
aussi une valeur morale contre l'ignorance et le fanatisme. Dans les
manuels scolaires, pour atteindre ces objectifs, on propose d'utiliser
comme support pédagogique des expériences historiques
sur les thèmes de la digestion
ou de la circulation. Entre 1950 et 1960, les réformes
proposent d'utiliser le cheminement des savants pour développer
un enseignement scientifique fondé sur la méthode de la
redécouverte de ce cheminement (voir, Gohau, G. (1987)
Revue Aster). Dès 1977, avec l'introduction d'un enseignement
scientifique par problèmes et investigations, avec la formulation
de questions à résoudre par l'observation et l'expérimentation,
l'histoire des sciences se retrouve en annexe des approches didactiques
et pédagogiques, comme un complément culturel : des
noms de savants illustres et des expériences historiques (les
premiers ayant parfois donné leur nom aux secondes), quelques
vignettes et quelques lignes, parfois un document dans un exercice,
mais toujours des textes sans contexte. Quelqu'un a un moment donné
a fait telle ou telle expérience. Pourquoi ? Comment ? Ce n'est
pas le propos (Savaton, 2011, p.120 ; voir aussi
Urgelli, 2012 autour de l'enseignement de l'évolution
en classe de troisième (MEN, 2008) et de seconde (MEN, 2010)).
En 1996, dans l'enseignement de sciences physiques et chmiques, puis
en 2000 en sciences de la vie et de la Terre, l'utilisation de l'histoire
des sciences réapparait en annexe des instructions officielles,
pour son rôle culturel, et on invite les enseignants à
proposer l'étude de documents historiques. Dans le programme
de collège de l'année 2005, la pratique de démarches
historiques dans l'enseignement des sciences est clairement explicitée
comme support dans l'application de la démarche d'investigation,
autour des thèmes de la digestion,
de la circulation mais aussi de l'évolution, de la découverte
des antibiotiques ou du modèle de la tectonique des plaques.
La réforme 2010 de l'enseignement scientifique en classe de seconde
puis classe de première S, confirmera cette utilisation de l'histoire
des sciences pour construire ou illustrer la démarche d'investigation.
Pour
l'histoire des sciences a souvent été revendiquée
comme un outil pour faire de l'épistémologie des sciences
et expliquer la nature des sciences, mais sans succès. Savaton
(2011, p.108-109 et 123) propose de rapprocher la didactique
des sciences de la démarche historique pour s'éloigner
d'une approche historique jugée au service d'une épistémologie
scolaire discutable. En effet, l'instrumentalisation de l'histoire des
sciences comme auxiliaire à l'enseignement scientifique apparait
dans la sélection de certains étapes de cette histoire,
des étapes jugés significatives et utilisées pour
soutenir une théorie, le plus souvent sans mise en contexte socioscientifique
et politique de cette histoire.
C'est une vision linéaire et progressive de l'histoire des sciences
qui s'exprime dans les instructions officielles, en classe de première
S notamment : en partant du modèle actuel de la tectonique des
plaques, les concepteurs du programme ont déterminé des
étapes conceptuelles qu'ils ont ensuite recherchées
historiquement. C'est une reconstructiion de l'histoire qui
est proposé, au service d'une démonstration [...] d'une
narration de la science. Plus exactement, dans le programme de
première S, il s'agirait de démontrer qu'un modèle
scientifique est une construction qui s'affine et se précise
au cours du temps. Par sa valeur prédictive, le modèle
permettrait la découverte de faits nouveaux, souvent conditionnée
par les progrès techniques. Ces faits nouveaux permettraient
l'évolution du modèle et son perfectionnement. L'histoire
des sciences devient ici un outil au service de cette épistémologie
scolaire particulière...
Exercice
: En s'inspirant des documents ci-dessous, proposez
une suite logique de mises en scène didactique (2 à 4
seances de classe pour des élèves de première S)
de
l'histoire des idées mobilistes et de la tectonique des plaques
au cours des XIXe et XXe siècle. Ces mises en scène, tant
que possible interdisciplinaires, viseront
à montrer quelques aspects de la nature des sciences et de leur
dynamique, en relation avec les contextes socioscientifiques et politiques
de l'époque.
Les thèmes d'éducation scientifique citoyenne à
développer dans vos séances sont indiqués dans
le tableau ci-dessous. Vous préciserez clairement à quel(s)
thème(s) se rapportent chacune de vos séances. Vous
n'hésiterez pas à évoquer l'utilisation d'autres
documents scientifiques et pédagogiques de votre choix, qui sembleraient
utiles à votre projet didactique.
THEMES
about the nature of science |
Educational
aims :
Students should be taught that... |
Science
and Questioning |
an
important aspect of the work of a scientist is the continual and
cyclical process of asking questions and seeking answers, which
then lead to new questions. This process leads to the emergence
of new scientific theories and techniques which are then tested
empirically. |
Status
of Scientific Knowledge
|
scientific
knowledge produces reliable knowledge of the physical world [...],
general and universal [...].
Scientific explanations are based on models and representations
of reality. |
Hypothesis
and Prediction
|
scientists
develop hypotheses and predictions about natural phenomena. This
process is essential to the development of new knowledge claims. |
Science
and Creativity |
science
is an activity that involves creativity and imagination as much
as many other human activities, and that some scientific ideas
are enormous intellectual achievements. Scientists, as much as
any other profession, are passionate and involved humans whose
work relies on inspiration and imagination. |
Science
and Certainty
|
why
much scientific knowledge, particularly that taught in school
science [and school texts], is well-established and beyond reasonable
doubt, and why other scientific knowledge is more open to legitimate
doubt. Current scientific knowledge is the best we have but may
be subject to change in the future, given new evidence or new
interpretations of old evidence. |
Observation
and Measurement
|
observation
and measurement are core activities of scientists; most measurements
are subject to some uncertainty but there may be ways of increasing
our confidence in a measurement. |
Analysis
and Interpretation of Data
|
the
practice of science involves skilful analysis and interpretation
of data. Scientific knowledge claims do not emerge simply from
the data but through a process of interpretation and theory building
[...]. It is possible for scientists legitimately to come to different
interpretations of the same data, and therefore, to disagree. |
Diversity
of Scientific Thinking
|
science
uses a range of methods and approaches and that there is no one
scientific method or approach. |
Science
and Technology
|
although
there is a distinction between science and technology, the two
are increasingly interdependent as new scientific discoveries
are reliant on new technology and new science enables new technology |
Cooperation
and Collaboration in the Development of Scientific Knowledge
|
scientific
work is a communal and competitive activity. Whilst individuals
may make significant contributions, scientific work is often carried
out in groups, frequently of a multidisciplinary and international
nature. New knowledge claims are generally shared and, to be accepted
by the community, must survive a process of critical peer review.
developments in scientific knowledge are not undertaken in isolation,
but may be shaped by particular contexts.
|
Constraints
on Development of Scientific Knowledge
|
scientific
knowledge is developed within the context of a range of constraints
that may shape it and its uses. scientific research is undertaken
in a variety of institutions by individuals who have differing
social status within the scientific community. Scientists generally
have expertise only in one specific subdiscipline of science |
Urgelli
(2013), d'après Bartholomew, H., Osborne, J.F., Ratcliffe, M. (2002)
et Osborne J., Collins S, Ratcliffe M., Millar R., Duschl R. (2003).
AVERTISSEMENT
: votre approche doit permettre de ne pas penser les sciences uniquement
en terme de savoir. Elle évitera une lecture temporelle et linéaire
de l'histoire qui décontextualise le récit scientifique
et permet uniquement de dresser une liste des grandes premières
scientifiques. Cette lecture, qualifiée d'histoire jugée,
n'aide pas à comprendre la nature des sciences, leurs dynamiques
et les choix des scientifiques au moment où ils sont en train
de faire la science. Même s'il est pourtant difficile de ne pas
être aussi un partisan de l'histoire jugée, un tel récit
gére difficilement la dynamique multiforme et en rhizomes des
sciences. D'après Pestre, D. (2006).
Instructions
officielles
Programmes
de l’enseignement de sciences de la vie et de la Terre
au collège - Introduction commune
Bulletin officiel spécial n° 6 du 28 août 2008,
p.1.
La perspective historique donne une vision cohérente
des sciences et des techniques et de leur développement
conjoint. Elle permet de présenter les connaissances
scientifiques comme une construction humaine progressive et
non comme un ensemble de vérités révélées.
Elle éclaire par des exemples le caractère réciproque
des interactions entre sciences et techniques.
Programmes
de l’enseignement de sciences de la vie et de la Terre
au lycée
Bulletin officiel spécial n° 4 du 29 avril 2010,
p.2-4.
Si les connaissances scientifiques à mémoriser
sont raisonnables, c’est pour permettre aux enseignants
de consacrer du temps à faire comprendre ce qu’est
le savoir scientifique, son mode de construction et son évolution
au cours de l’histoire des sciences [...].
L'approche historique d'une question scientifique peut être
une manière originale de construire une démarche
d'investigation. L'histoire de l'élaboration d'une connaissance
scientifique, celle de sa modification au cours du temps, sont
des moyens utiles pour comprendre la nature de la connaissance
scientifique et son mode de construction, avec ses avancées
et éventuelles régressions. Il conviendra de veiller
à ce que cette approche ne conduise pas à la simple
évocation d'une succession événementielle
et à ne pas caricaturer cette histoire au point de donner
une fausse idée de la démonstration scientifique :
si certains arguments ont une importance historique majeure,
il est rare qu'un seul d'entre eux suffise à entraîner
une évolution décisive des connaissances scientifiques ;
de même, il serait vain de prétendre faire « réinventer »
par les élèves, en une ou deux séances,
ce qui a nécessité le travail de plusieurs générations
de chercheurs. |
Capacités
et attitudes développées tout au long du programme
de sciences de la vie et de la Terre au lycée
d'après le Bulletin officiel spécial
n° 4 du 29 avril 2010, p.7.
-
Pratiquer
une démarche scientifique (observer, questionner,
formuler une hypothèse, expérimenter, raisonner
avec rigueur, modéliser).
-
Recenser,
extraire et organiser des informations.
-
Comprendre
le lien entre les phénomènes naturels et le
langage mathématique.
-
Manipuler
et expérimenter.
-
Comprendre
qu’un effet peut avoir plusieurs causes.
-
Exprimer
et exploiter des résultats, à l’écrit,
à l’oral, en utilisant les technologies de
l’information et de la communication.
-
Communiquer
dans un langage scientifiquement approprié : oral,
écrit, graphique, numérique.
-
Percevoir
le lien entre sciences et techniques.
-
Manifester
sens de l’observation, curiosité, esprit critique.
- Être
capable d’attitude critique face aux ressources documentaires.
-
Montrer
de l’intérêt pour les progrès
scientifiques et techniques.
-
Être
conscient de sa responsabilité face à l’environnement,
la santé, le monde vivant.
- Avoir
une bonne maîtrise de son corps.
- Être
conscient de l’existence d’implications éthiques
de la science.
- Respecter
les règles de sécurité.
- Comprendre
la nature provisoire, en devenir, du savoir scientifique.
- Manifester
de l’intérêt pour la vie publique et les
grands enjeux de la société.
- Savoir
choisir un parcours de formation.
|
Classe
de Première S
La tectonique des plaques : l’histoire d’un modèle
Bulletin
officiel spécial n° 9 du 30 septembre 2010, p.4-6.
|
Extraits
des capacités et attitudes associées à
cette partie du programme |
Les grandes
lignes de la tectonique des plaques ont été
présentées au collège. Il s’agit,
en s’appuyant sur une démarche historique, de
comprendre comment ce modèle a peu à peu été
construit au cours de l’histoire des sciences et de
le compléter. On se limite à quelques étapes
significatives de l’histoire de ce modèle. L’exemple
de la tectonique des plaques donne l’occasion de comprendre
la notion de modèle scientifique et son mode d’élaboration.
Il s’agit d’une construction intellectuelle hypothétique
et modifiable. Au cours du temps, la communauté scientifique
l’affine et le précise en le confrontant en permanence
au réel. Il a une valeur
prédictive et c’est souvent l’une
de ces prédictions qui conduit à la recherche
d’un fait nouveau qui, suivant qu’il est ou non
découvert, conduit à étayer ou modifier
le modèle. La solidité
du modèle est peu à peu acquise par l’accumulation
d’observations en accord avec lui. Les progrès
techniques accompagnent le perfectionnement du modèle
tout autant que les débats et controverses.
NB - À
partir de l’exemple de la tectonique des plaques, les
élèves seront conduits à comprendre quelques
caractéristiques du mode de construction des théories
scientifiques.
|
-
Comprendre
les difficultés d’acceptation des premières
idées de mobilité […]
-
Comprendre
comment des observations fondées sur des techniques
nouvelles ont permis de dépasser les obstacles du
bon sens apparent […]
-
Comprendre
comment la convergence des observations océanographiques
avec les mesures de flux thermique a permis d’avancer
l’hypothèse d’une expansion océanique
réactualisant l’idée d’une dérive
des continents
-
Comprendre
comment la corrélation entre les anomalies magnétiques
découvertes sur le plancher océanique et la
connaissance plus ancienne de l’existence d’inversion
des pôles magnétiques confirma l’hypothèse
de l’expansion océanique […]
-
Comprendre
comment désormais des faits ne s’intégrant
pas a priori avec le modèle initial (volcanisme intraplaque)
permettent un enrichissement du modèle (théorie
des points chauds) et non son rejet.
-
Corréler
les directions et les vitesses de déplacements des
plaques tirées des données paléomagnétiques
avec celles déduites de l’orientation et des
âges des alignements volcaniques intraplaques.
|
La
révolution scientifique de la fin du XIXe
siècle et du XXe siècle
Urgelli,
2012
Pour
la seconde moitié de XIXe siècle, Pestre
considère que la chimie, la télégraphie,
l'électricité, la radio sont des cas d'école.
Kelvin, philosophe de la nature au Royaume Uni et Maxwell
contribueront directement, techniquement et théoriquement,
au projet impérial de réseau de cables télégraphiques
transatlantiques, via l'Association britannique pour l'avancement
des sciences. En relation avec les compagnies qui posent les
cables, leur but était de faire progresser les savoirs
mais dans le même mouvement de développer des techniques
permettant de gagner de l'argent et de contribuer à la
puissance de l'empire dans sa lutte commerciale et militaire
contre les autres nations. Les mêmes acteurs circulent
donc entre plusieurs mondes. Pour
Pestre, ce moment qu'on a appelé révolution
scientifique est un moment de fondation et d'invention
d'une science moderne marquée par le
souci de l'opérationnalité et de la maitrise,
via l'expérience controlée et la mathématisation.
Dès lors, il n'est plus de science pure qui vive séparée
du monde et la dynamique devient principalement socioscientifique.
On pourrait
décrire cette dynamique socioscientifique à partir
de l'exemple des géophysiciens impliqués dans
l'exploration pétrolière de fonds océaniques
dans les années 1960. En pleine guerre froide et à
la suite de la troisième année polaire internationale
(Année Internationale de
la Géophysique, 1957-1958), la théorie
de l'expansion des fonds océaniques obtiendra la robustesse
qu'on lui connait actuellement.
|
Deparis,
V. & Legros, H. (2000). Voyage à l'intérieur
de la Terre. Une histoire des idées. CNRS Editions.
La
période de 1830 à 1900 est marquée
par une confrontation entre les implications de la géologie
et des phénomènes de mécanique terrestre.
Le volcanisme, la formation des montagnes, l'équilibre
isostatique de la croute suggéré par les mesures
gravimétriques, nécessitent [...] une fusion interne
sous une croute de faible épaisseur. Les travaux de mécanique
sur la rotation de la Terre [...], sur les déformations
élastiques du globe [...], sur les déformations
plastiques de la Terre [...] et sur la figure d'équilibre
de la Terre favorisent au contraire un globe solide.

Le
modèle de Terre consensuel
des années 1870-1880

Modèle de Terre en densité proposé
en 1897
pour retrouver la densité moyenne et l'aplatissement
de la Terre.
|
Pour les géologues
[...], la fluidité interne est prouvée d'une
manière irréfutable par les
éruptions volcaniques, par les phénomènes
isostatiques [...]. Pour les mécaniciens,
le seul argument de la très grande rigidité
indiquée par les
marées suffit à impliquer
une Terre globalement solide. Chacun dans sa discipline
possède une méthode particulière
(basée sur l'observation ou sur des calculs théoriques),
et garde à l'esprit des points précis (volcans,
marées,...) qui imposent une certaine idée
sur l'intérieur de la Terre. Chacun
a ses images mentales, des présupposées,
une culture et une intuition d'où découlent
certains modèles de Terre. Cela
indique [...] l'importance des a priori dans
l'interprétation des phénomènes,
et surtout la difficulté de tenir compte de l'ensemble
des faits en ne s'appuyant pas exclusivement sur une seule
catégorie de phénomènes. Entre les
positions extrêmes du camp des fluidistes et de
celui des solidistes, des géologues et des physiciens
cherchent à concilier les impératifs de
la géologie et les implications de la mécanique
terrestre. Le modèle qui vers les années
1870-1880 réalise alors un certain consensus est
celui d'une Terre composée d'une croûte solide
de faible épaisseur, d'une couche intermédiaire
plus ou moins fludie et d'un noyau solide (p.376).
Cordier,
en 1827, en s'appuyant sur l'observation
des météorites dont certaines
montraient une composition riche en fer, supposait que
le fer à l'état métallique, allié
au nickel, pouvait [...] entrer abondamment dans la composition
interne de la Terre et que le globe pouvait renfermer
un noyau de fer. L'analogie entre les météorites
et la Terre est poursuivie [...]. Les valeurs de Roche
en 1881 et de Wiechert en 1897 sont [...] les premières
estimations de la densité et du rayon du noyau
terrestre. (p.386-389).
En
1909, dans la quatrième partie du tome
III de son livre La Face de la Terre, Suess
rappelle que les météorites
peuvent être considérées comme des
débris d'une planète "anonyme"
qui circulait jadis entre Mars et Jupiter. Cette planète
hypothétique, formée par l'ensemble des
météorites, permet d'imaginer par analogie
la composition de la Terre. Suess propose trois zones
ou enveloppes : au centre, la barysphère ou le
nife, composée essentiellement de fer et de nickel
; ensuite, la couche de sima dont les minéraux
sont principalement constitués de silicium et de
magnésium, et enfin la couche de sial dont les
minéraux sont principalement constitués
de silicium et d'aluminium (roches feldspathiques) [...]
Ce modèle de Terre restera longtemps la référence
dans le milieu des géologues même si les
profondeurs des interfaces seront repositionnées
par la sismologie (p. 391).
Pendant
toute la première partie du XXe siècle,
il s'agira de trouver des modélisations rhéologiques
des couches de la planète qui permettent de rendre
compte à la fois de la propagation des ondes sismiques,
des déformations dues aux marées ou aux
perturbations de la rotation et des phénomènes
géologiques. Il s'agira en particulier de comprendre
la notion de viscosité et le rôle du temps
dans le comportement du globe, et de chercher à
rapprocher la modélisation physique d'une vision
réaliste de la Terre (p.403).
|
2.
La période qui débute en 1900 et s'arrête
vers les années 1960 [...] est marquée
par les progrès rapides et importants dans tous les domaines
et proviennent de la multiplication des mesures physiques : mesures
sismologiques, géodésiques, magnétiques,
de déformations élastiques du sol, du mouvement
du pôle de rotation, des paramètrs physiques des
roches. Les recherches sur la dynamique terrestre se développent
avec des travaux sur les mouvements isostatiques, sur la dérive
des continents et sur les mouvements convectifs. Au cours de cette
période, les études se spécialisent et aboutissent
à différents modèles de Terre : modèles
élastique, sismologique, thermique, gravimétrique,
magnétique et tectonique, sans toutefois qu'une synthèse
globale puisse s'imposer. (p.19-21).
Parmi les découvertes importantes faites aux alentours
des années 1900 et qui ont marqué l'étude
de la Terre, notons principalement celle de la radioactivité
naturelle de certains corps. Le développement
final de la mécanique classique des milieux continus a
également une importance considérable pour l'étude
de la dynamique du globe [...] Elle comble de façon phénoménologique
le hiatus entre la mécanique des solides et la mécanique
des fluides en permettant de modéliser le fluage plastique
et visqueux des corps. (p. 405-406). Au cours de la période,
le cumul de plus en plus important des informations peut s'effectuer
au sein d'organisations internationales.
Après l'Association internationale de géodésie
en 1863 et le Service international des latitudes vers 1885, la
sismologie se regroupe vers 1903 et l'Union géodésique
et géophysique internationale est créée en
1922. Les nombreuses observations géophysiques amènent
le développement d'une grande diversité de moélisations.
(p.406).
Les mesures thermiques ne se développent
qu'à la fin de la période avec celles pratiquées
sur le flux de chaleur en surface aussi bien sur Terre qu'en mer.
Les études thermiques sont toutefois entièrement
renouvelées par la découverte
de la radioactivité
qui remet en cause l'idée d'un refroidissement
inéluctable de la planète [...]
Les mesures magnétiques
[...] mettent en évidence l'inversion globale du champ
magnétique et suggèrent une piste pour tester les
dérives continentales [...] La génération
du champ magnétique terrestre est expliquée par
l'idée de la théorie dynamo [...] qui suggère
que le noyau fluide est animé de courants de matière.
Dans
le domaine de la géologie, on se situe dans le prolongement
de la grande synthèse de Suess. Cependant,
le contexte évolue avec le développement de la
radiochronologie qui permet une datation absolue
des roches et des époques, ainsi qu'une détermination
de l'âge de la Terre (p.407). La
géologie du début de XXe siècle est soumise
à de nouvelles contraintes apportées par l'exploration
océanique et la physique. Alors qu'elle
expliquait l'histoire et les structures des continents par l'étude
des strates et des montagnes, elle se voit obligée
d'expliquer ce qui se passe dans les bassins océaniques
où des nouveaux problèmes apparaissent. En outre,
les deux grandes idées qui
structuraient la géologie à la fin du XIXè
siècle, la théorie de Laplace de
la formation chaude de la planète à partir d'une
nébuleuse primitive et la théorie du reforidissement
séculaire se trouvent remises en question. Enfin, le problème
géologique se modifie dans la mesure où il doit
s'intégrer dans l'immense durée révélée
par la radiochronologie et
prendre en compte les informations apportées par la
sismologie [...], la gravimétrie et la prospection géophysique
[...] Elles permettent le développement de très
nombreux modèles relatifs à la tectonique, de la
même manière qu'on avait observé un foisonnement
de modèles géophysiques. [...].
Un concept essentiel émerge
qui privilégie le mobilisme relativement au fixisme ou
au permanentisme. Le
mobilisme se manisfete aussi bien par l'image des dérives
continentales que par la mécanique des mouvements de convection.
L'introduction de ce nouveau concept sera l'occasion de débats
et de polémiques houleuses [...] pour les uns, la planète,
bien que solide peut se déformer comme un fluide aux longues
échelles de temps et être animé de mouvements
superficiels et profonds d'une grande amplitude ; pour les autres,
la Terre solide garde un comportement rigide même à
travers les longues échelles de temps et ne permet que
des mouvements horizontaux et verticaux de faible ampleur [...]
Il s'agit maintenant de comprendre comment une Terre rigide peut
permettre des phénomènes de fluages plastiques ou
visqueux, et ainsi d'essayer d'expliquer conjointement les observables
géologiques, physiques et mécaniques. (p.475-476).
L'aventure
océanographique commence dans les années
1920, grace à la mise au point des
sondages par la méthode des ultrasons.
La topographie accidentée des fonds sous-marins ainsi révélée
se présente avec des montagnes et surtout des fosses en
bordure du Pacifique et dans les Antilles. L'exploration
s'intensifiera au lendemain de la Seconde Guerre mondiale grâce
au développement de l'océanographie et des techniques
de reconnaissance sous-marine (échosondeur,
écoute sismique, détection magnétique,...).
Mais c'est à la fin des années 1950 que les différentes
structures océaniques seront identifiés, avec en
particulier la découverte des rides [...] dans les océans
du globe [...] et de zones de fractures particulièrement
remarquables.(p.477).
Les
études géologiques de la première partie
du XXe siècle se situent dans le prolongement de celles
du siècle précédent. Il s'agit essentiellement
d'établir des cartes détaillées
de la géologie des continents et de préciser
les processus géométriques, géographiques
et génétiques des chaines de montagnes. [...] L'idée
de cycles orogéniques, développée au XIXe
siècle, avec des périodes d'activité tectonique,
de construction de montagnes et des périodes de repos est
fortement réaffirmée [...] (p.478). La géologie
continentale du XXè siècle [...] ne montre pas d'aspects
réellement novateurs.
Ce
sont plutot les observations géophysiques, en particulier
de la sismicité et des anomalies
de champ de gravité qui ouvrent de nouvelles
perspectives de recherche. [...] Deux familles de séismes,
dans les montagnes actuelles et sur le fond des océans,
se complétent pour dessiner des lignes qui encadrent des
aires stables de l'écorce terrestre. Ce fait conforte les
idées de Haug sur la répartition
des géosynclinaux [...] les phénomènes tectoniques
ne concerneraient que des ceintures étroites entourant
des unités continentales ou océaniques stables (p.479).
Carte des épicentres
des grands séismes de 1913 à 1933
In Coulomb J. (1952).
|

Carte des aires continentales. In É. Haug, Les
géosynclinaux et les aires continentales |
Une
théorie, inaugurée par Reid en 1910, et connue sous
le nom de théorie du rebond élastique [...] relie
pour la première fois [...] la notion de tremblement de
Terre à celle de mouvement tectonique. Elle met en évidence
l'importance du concept de faille et permet le développement
de la notion de mouvement cohérent de parties de la croute.
Une autre observation géophysique [...] est celle des anomalies
de gravité, principalement en mer. Ces
anomalies [...] occupent une place essentielle dans les conceptions
tectoniques [...] les observations
sismiques et gravimétriques [...] apportées
par une communauté de chercheurs qui n'étaient pas
géologues de formation, vont compliquer les schémas
explicatifs de la tectonique classique et permettre un autre regard
sur les structures géologiques de la Terre. (p.479-480).
La
théorie de la contraction thermique et la formation des
chaines de montagnes
L'idée
de la contraction du globe due à son refroidissement progressif
a joué [...] un role très important tout au long
du XIXe siècle pour expliquer la formation des montagnes
[...] Ces études sont poursuivies au début du XXe
siècle par Holmes et son changement de
position et surtout par Jeffreys. Les difficultés
nouvelles résultent de la production de chaleur par les
désintégrations radioactives.
Pour Jeffreys, cette production interne n'empêche pas le
refroidissement de la Terre au cours des temps [...] la compression
externe due à la contraction thermique reste la principale
cause de l'orogenèse [...] Dès 1920, la constestation
vient de considérations sur l'ampleur des mouvements horizontaux
observés dans les chaines de montagne et de doutes sur
la notion même du refroidissement progressif de la Terre
au cours des temps [...] Les mouvements tangentiels de large envergure,
nécessaires pour expliquer la formation des montagnes,
apparaissent incompatibles avec la théorie de la contraction
thermique [...] l'hypothèse de base de la contraction thermique
qui est le refroidissement du globe est elle-même réfutée
par un certain nombre d'auteurs dont Joly et Holmes
[...] des auteurs considèrent l'état thermique du
globe comme un état d'équilibre entre la production
de chaleur par la radioactivité interne et son émission
vers l'espace (p. 480-482).
La
dérive des continents
Contrairement
aux études sur la contraction thermique, la théorie
de la dérive des continents ne cherche pas seulement à
expliquer la formation des montagnes. [...] Elle introduit l'idée
essentielle du mobilisme, où des mouvements de très
grandes ampleurs sont envisagés [...] Wegener n'est pas
le premier à imaginer une translation continentale [...]
mais il est le premier à étayer son hyopthèse
par un nombre considérable de preuves émanant de
sources très diverses, élaborant ainsi une théorie
scientifique cohérente [...]. Les arguments paléontologiques
de liaisons intercontinentales ne manquaient pas [...] Suess
et Neumayr s'en servaient déjà pour réunir
les continents actuels en d'anciennes unités continentales
qui se seraient ensuite effondrées [...] la théorie
concurrente à celle de Suess, soit celle de la permanence
des océans et des continents (théorie de
Dana), et qui est renforcée par l'isostasie et
par toute preuve de différence de nature entre les fonds
océaniques et les socles continentaux, est contraire aux
preuves paléontologiques et biologiques de liaisons intercontinentales.
Les deux théories de la fin du XIXe siècle, celle
de Suess et celle de Dana, sont donc toutes les
deux en contraction avec les faits nouveaux ; Wegener [...] montre
comment les translations peuvent réconcilier à la
fois les preuves paléontologiques et les exigences de l'isostasie
[...] Il cherche à conforter son idée par toute
une série d'indices nouveaux [...] il avance des arguments
géologiques, paléoclimatiques et géodésiques
[...] C'est cette globalité, cette possibilité de
rendre compte d'une multitude de phénomènes, de
regrouper les arguments des différentes disciplines des
sciences de la Terre (paléontologie, paléoclimatologie,
stratigraphie, géologie, géodésie, géophysique)
qui donne à l'idée de la dérive son originalité,
son intérêt et sa force, et qui met en évidence
sa très grande fécondité. Wegener poursuit
en quelque sorte la démarche de Suess [...] en approfondissant
la géologie comparée et en précisant les
rapports entre les différentes parties du globe, et, d'autre
part, en développant une vue générale de
la surface de la Terre [...] regroupant les différentes
approches possibles (p.484-491).
Les
forces de la dérive
L'hypothèse
de la dérive n'est donc envisageable que par la possibilité
d'un comportement fluide de la couche simatique sous jacente.
[...] les forces postulées sont [...] la force vers l'équateur,
les forces de précession, les frictions des marées
et l'attraction directe entre les continents [...] Wegener, avec
d'autres auteurs, estime que ces différentes forces, bien
que très faibles, peuvent produire un déplacement
appréciable des continents car elles agissent constamment
dans la même direction et avec la même intensité
pendant tous les temps géologiques [...] Cette affirmation
[...] constitue le point le plus
controversée de la théorie [...]
Toute la difficulté réside donc encore une fois,
comme pour les problèmes isostatiques, dans la compréhension
du comportement rhéologique de la Terre. Les couches externes
du globe possèdent-elles [...] un seuil de plasticité
? Est-il possible qu'elles se laissent déformer par des
forces extremement faibles mais agissant pendant de très
longues durées, ou faut-il qu'un seuil soit dépassé
? [...] Au cours des discussions sur la théorie de Wegener,
[...] le mécanisme invoqué pour expliquer la dérive
ne peut pas être pleinement satisfaisant [...]
Bull,
en 1921, [...] propose l'idée remarquable de mouvements
convectifs résultant [...] d'un chauffage différentiel
du à une distribution non uniforme des éléments
radioactifs. [...] Les hypothèses de Bull [...] très
proches de celle de Holmes [...] posent l'idée
que les mouvements des continents peuvent être la manifestation
en surface de mouvements profonds et que le mécanisme responsable
du déplacement des continents est l'évacuation thermique
contenue dans la Terre (p.492-500).
En
1930, l'année de la mort de Wegener, [...] la théorie
de la dérive ne s'impose pas [...] Les objections au mécanisme
causal sont [...] légitimes [...] l'absence presque totale
de connaissances dans la géologie des océans limitait
les tentatives d'appréhension générale du
globe et a certainement beaucoup joué dans le refus des
vues de Wegener : sa synthèse était trop précoce,
les connaissances sur le globe trop partielles [...] les années
1930-1950 sont caractérisées par une absence assez
nette de confrontation [...] que ce soit chez les partisans comme
chez les négateurs [...] Il faut dire qu'un certain nombre
de géologues et de géophysiciens ne sont que très
peu préoccupés par cette théorie. Elle ne
leur parait d'aucune utilité dans leurs investigations
personnelles, que ce soit par exemple pour l'étude de la
structure géologique de régions continentales précises
ou pour la détermination d'un modèle de Terre en
densité et en composition chimique. Chaque
spécialité semble plus concernée par l'approfondissement
de son domaine d'étude que par le développement
d'une vue générale sur la Terre, et peut sans difficulté
aucune se passer d'une théorie sur les translations continentales.
(p.502-504).
Les
études paléomagnétiques
permettent donc la confirmation des idées de Wegener. Malgré
tout, ces nouveaux arguments n'apparaissent pas suffisamment concluants
pour remporter l'adhésion. Les doutes sur la qualité
des mesures sont trop importants et on reproche aux paléomagnéticiens
d'avoir trop négligé les possibilités d'altération
des aimantations anciennes, soit par disparition, soit par addition
d'aimantations parasites. Jeffreys (1959) demande
même si le marteau nécessaire pour briser les roches
transportées au laboratoire n'affecte pas leur magnétisme.
[...] Malgré les données paléomagnétiques,
la théorie des translations continentales ne s'impose toujours
pas [...] la plupart des arguments pro ou anti-wegenériens
restent sensiblement les mêmes en 1960 qu'en 1930 : ils
ne reposent toujours que sur la géologie continentale et
n'incorporent pas la géologie des fonds océaniques
(p.507).
L'opposition
mobiliste-fixiste par rapport aux déplacements
superficiels de blocs continentaux n'a donc pas connu de développement
significatif entre 1930 et 1960. elle s'est cependant développé
dans une autre direction [...] avec la confrontation soulevée
par l'hypothèse des courants de convection d'origine thermique.
Le mobilisme n'est plus superficiel
mais interne. Les théories convectionnistes
[...] ne sont pas (si l'on excepte Holmes) reliées
à la théorie de Wegener, ni invoqués pour
donner les forces de la dérive, mais plutot pour fournir
les forces de l'orogenèse (p.507).
Bilan
de la période 1900-1960
L'idée
marquante est l'introduction de
la notion de mobilisme, d'une part grâce
à la théorie de la dérive des continents
par Wegener en 1912 puis, d'autre part, sur la base de l'hypothèse
des courants de convection. Les études mécaniques
cherchant à prouver ou à réfuter ces idées
sont extrêmement nombreuses [...] Toutefois, malgré
la richesse et la multiplicité des idées émises
à l'époque, une vision globale de la Terre ne s'impose
pas. Il faudra attendre les années 1960, à la suite
de l'exploration systématique
des fonds des océans, pour qu'une synthèse
des différentes connaissances acquises au cours du siècle
soit possible (p.407).
L'absence d'une
théorie unificatrice est troublante lorsqu'on sait que
la situation va évoluer très rapidement au cours
des années 1960 et que la théorie tectonique globale
qui va s'imposer aura pour base les idées de dérives
continentales et de convection mantellique émises très
tot par Wegener et Holmes. A
la fin des années 1950, les deux théories de la
dérive et de la convection restent toutefois deux théories
séparées. On ne saisit pas comment
les courants de convection pourraient être le moteur du
mouvement des continents. L'idée manque pour réunir
les idées dispersées et ce n'est que lorsqu'on trouvera
l'articulation entre les mouvements internes et les mouvements
superficiels qu'une vision unifiée des phénomènes
de surface pourra advenir. (p.550)
3.
L'époque actuelle
L'année
géophysique internationale (1er juillet 1957 - décembre
1958) et le lancement des premiers satellites
articificiels pourraient marquer le début
de l'époque actuelle. Cette dernière période,
par le nombre et l'actualité des travaux, ne peut pas encore
faire l'objet d'une étude historique. Nous nous contenterons
d'en donner les traits essentiels [...]. Suite à l'évolution
des découvertes géophysiques et surtout à
l'exploration généralisée
des fonds océaniques, Hess (1962)
émet l'hypothèse que les dorsales océaniques
représentent la trace des courants ascendants de cellules
de convection et que la ceinture volcanique circum-pacifique est
la manifestation en surface des courants descendants (p.551).
[...] L'idée de Hess est confortée par Morley,
Vine et Matthews en 1963 qui interprétent
les anomalies magnétiques découvertes
sur le plancher océanique comme des marqueurs de l'expansion
[...] En outre, l'échelle des inversions établie
par les paléomagnéticiens permet de quantifier les
vitesses d'expansion des océans, en associant les linéations
magnétiques aux inversions correspondantes. Les indices
de la dérive ne sont donc plus uniquement continentaux
mais également océaniques et, puisqu'il est reconnu
que les océans se sont ouverts, il n'est plus possible
de nier que les continents ont dérivé ! [...] En
1967, on développe le concept de zones de subduction en
interprétant les séismes profonds sous les fosses
océaniques comme la trace du retour de la lithosphère
océanique dans le manteau. Ces différentes approches
seront synthétisées en 1967-1968 par Morgan,
Mac Kenzie et Le Pichon qui formulent la théorie
de la tectonique des plaques (p.552).
Cette nouvelle approche de la Terre a également bénéficié
d'une autre évolution importante, liée à
l'exploration planétaire.
Les voyages lunaires des années 1969-1970, puis l'envoi
de sondes vers les autres corps du système solaire, montrent
des planètes géologiquement différentes de
la Terre. La comparaison entre les divers corps du système
solaire suscite la naissance d'une véritable science des
planètes (p.553).
L'afflux extraordinaire d'informations apportées par les
observations satellitaires, les expéditions océanographiques,
les campagnes de prospection gravimétrique et sismique,
les mesures sismologiques et les expériences de laboratoire
aux hautes pressions et hautes températures.
De plus, les moyens de calculs permettent
de multiples modélisations à partir
des solutions numériques des équations de la mécanique
[...] Outre des précisions importantes apportées
dans la modélisation thermique et dans les conceptions
ds changements de phase dans le manteau, les développements
majeurs concernent la prise en compte des variations latérales
des paramètres physiques et le renouvellement des études
géomagnétiques à partir de l'idée
de dynamo auto-excitée (p.553-554).
Le
modèle de Terre actuel et l'avènement
d'une théorie fédératrice (la théorie
de la tectonique des plaques et de la convection mantellique)
apportent des réponses simples et convaincantes aux questions
posées par les observations et les mesures de surface.
(p.19-21).
La formulation d'un nouveau schéma explicatif général
a été possible, où les différentes
morphologies de la surface ont pu prendre sens. Un point important
est la considération des phénomènes
physico-chimiques (la différenciation magmatique et le
métamorphisme) qui surviennent aux frontières
de plaques et qui permettent de comprendre la formation de la
croute océanique et de la croute continentale (p.557).
CONCLUSION
:
Les conceptions actuelles reprennent le plus souvent d'anciennes
idées contradictoires afin d'en montrer la complémentarité.
De nombreuses controverses du passé ont ainsi été
résolues par l'apparation d'un niveau plus profond de compréhension,
qui a permis l'abandon d'une explication
unique au profit de la diversité et la complexité
: la Terre est à la fois à symétrie sphérique
et à hétérogénéités
latérales, à la fois fluide et solide, à
la fois façonnée par des processus uniformitaristes
et catastrophistes. La diversité des manifestations peut
malgré tout être expliquée à l'aide
d'un principe unificateur simple
: le moteur thermique dû au refroidissement du globe.
Il entraine la déchirure des plaques, la subduction de
la matière froide et l'expansion des fonds océaniques,
induit les mouvements lithosphériques fournissant les forces
nécessaires à l'édification des structures
géologiques et permet, aux frontières des plaques,
des processus physico-chimiques à l'origine de la croute
océanique et de la croute continentale. La
compréhension actuelle de notre planète résulte
ainsi à la fois de la reconnaissance de la variété
des phénomènes et de la possibilité de son
interprétation par une mécanisme thermique simple.
[...] Dans cette longue exploration [...] soulignerons-nous assez
l'intéret, la pertinence et la "beauté"
des théories de chaque époque qui ont toutes le
mérite de chercher une explication intelligente à
la réalité, et de montrer l'ingéniosité
et la créativité de la démarche scientifique
(p.569).
|
Ellenberger,
F. Hsitoire de la Géologie, Encyclopédie
Universalis.
La
géologie s'est constituée en une science organisée
avec une étonnante rapidité, au début du
XIX e siècle. Depuis lors, elle s'est progressivement développée,
enrichie et diversifiée. […] lors de sa grande éclosion,
cette science a bouleversé les rapports entre l'homme et
le monde, en révélant la durée prodigieuse
des temps qui ont précédé l'humanité,
et en ressuscitant les mondes vivants innombrables qui, avant
elle, s'étaient succédé sur la surface de
la Terre. Ce faisant, elle empiétait forcément sur
le domaine des enseignements des Églises. Certains ont
volontiers allégué que la géologie moderne
était née d'une victoire de la raison sur l'obscurantisme
religieux, favorisée en outre par la révolution
industrielle. […] les choses n'apparaissent pas aussi simples.
[...]
entre 1810 et 1830, un prodigieux bond en avant se produit, exemple
remarquable d'une révolution créatrice
; une communauté géologique internationale se crée
; les échanges et rencontres se multiplient. En 1807 est
fondée la Geological Society
of London. En 1830, ce sera le tour de la Société
géologique de France ; dès lors,
la géologie est une science adulte. Répugnant aux
théories hâtives, elle se veut « positive »,
pressée de décrire méthodiquement la constitution
géologique de territoires petits ou grands [...] C'est
désormais une histoire de la surface terrestre, reconstituée
pas à pas, qui est l'objectif essentiel.[...] Bornons-nous
à quelques jalons.
On
propose enfin une explication rationnelle de la formation des
montagnes [...] Léonce Élie de Beaumont
(1798-1874) relie logiquement l'orogenèse au refroidissement
lent du globe, dogme admis durant tout le siècle (la première
« tectonique globale », a-t-on écrit). Il montre
que des « soulèvements » répétés
ont affecté la France et les territoires voisins, soulèvements
marqués par des discordances angulaires d'âges différents
selon les lieux et, à distance, par des ruptures dans la
sédimentation tranquille, accompagnées d'un changement
de faune. Il y voit des catastrophes dues au brutal réajustement
de la croûte terrestre devenue trop grande pour l'intérieur
qui se contracte du fait de son refroidissement continu. [...]
L'orogenèse
est révolutionnée, dans les années 1885-1900,
par la découverte inattendue des grandes nappes de charriage,
principalement dans les Alpes (Marcel Bertrand, 1847-1907, etc.).
La seule contraction du globe par refroidissement devient inadéquate.
Le fait des nappes implique un minimum de mobilité des
continents. En 1924, Émile Argand (1879-1940) adopte de
ce fait avec enthousiasme l'essentiel des idées d'Alfred
Wegener (1880-1930). Notons que l'exploration
de l'Ouest américain met en vedette les vastes mouvements
verticaux lents [...] spontanés [...] ou par réajustement
isostatique [...]. Le grand tectonicien Eduard Suess
publie, entre 1883 et 1909, la première synthèse
complète de la géologie structurale de la Terre
mais refuse les mouvements ascensionnels de sa surface. La
paléontologie et la micropaléontologie
[...] ont fait des progrès vertigineux, au point d'obliger
les spécialistes à limiter de plus en plus leur
champ d'activité. Les fossiles restent l'instrument privilégié
de datation des couches mais, désormais, au côté
de méthodes physiques, au premier rang desquelles la radiochronologie,
dont l'initiateur fut le physicien Ernest Rutherford et le pionnier
en géologie Arthur Holmes [...]. Dès
1905, on suppute des âges de 2 milliards d'années,
à la grande colère de lord Kelvin
[...].
La
géologie actuelle est l'aboutissement d'un développement
historique qu'il faut connaître pour comprendre l'articulation
logique des innombrables spécialisations
où elle a tendance à s'éparpiller : c'est
la conséquence de l'énorme
accroissement, depuis les années soixante,
du nombre de chercheurs et de publications. Cette situation n'a
pas de précédent. [...] L'histoire nous tend un
miroir ; elle nous montre notamment le danger des systèmes
si bien construits que l'on a tendance à s'y enfermer,
en se contentant de les enrichir frileusement du dedans. Les progrès
futurs sont en général inattendus, voire dérangeants
([...] les nappes et la radioactivité
brisent le consensus de la contraction,
Wegener s'insurge contre les continents immuables, etc.). Les
conduites humaines changent peu ; il est bon d'étudier
la logique des erreurs passées : elles peuvent éclairer
les voies de notre science actuelle, en nous incitant à
ne pas nous enliser, à poursuivre avec esprit critique,
indépendance et audace la quête séculaire,
jamais achevée. |
Hallam,
A. (1976). Une révolution dans les sciences
de la Terre. Editions Seuil.
On
eut donc pu s'attendre, une fois passées les premières
réactions de scepticisme, à ce que des équipes
de chercheurs soient suffisamment stimulées par cette théorie
pour tenter de la mettre à l'épreuve de diverses
façons. Tel ne fut pourtant pas le cas avant la guerre,
ni même immédiatement après. La plupart des
chercheurs, au contraire, et surtout en Amérique du Nord,
soit rejeterent purement et simplement l'hypothèse de la
dérive des continents comme un tissu d'absurdités,
soit conservèrent à son égard le plus grand
scepticisme.
Holmes
souffrit peut etre du peu de renommée
de la revue qui l'avait publié [...]. Toujours
est-il que la grande majorité des géologues et des
géophysiciens pensaient pouvoir reléguer les théories
générales comme celle de la dérive des continents
au ban de leurs préocupations, et se
cantonner dans leurs diverses spécialités.
Il fallut l'irruption explosive de données et d'idées
nouvelles, qui, dans les deux décennies
qui suivirent 1950, résultat du très grand élargissement
de la communauté scientifique pour que
l'on prenne conscience de l'état de stagnation intellectuelle
qui avait caractérisé l'histoire des sciences de
la Terre dans les décades précédents. (p.60).
L'une
des principales raisons pour lesquelles la controverse d'avant-guerre
s'était montrée si peu féconde était
notre ignorance totale de la constitutions
des fonds océaniques qui, compte tenu des
mers intérieures, ne couvrent pas moins de 70% de la surface
de la planète. Nos connaissances en ce domaine devaient
s'accroitre considérablement à partir des années
cinquante et beaucoup d'idées se trouvaient modifiées
par suite des nouveaux travaux océaniques. Cependant, c'est
dans un autre domaine relativement récent, celui de l'aimantation
des roches que la conception encore régnante
de continents fixes fut pour la première fois sérieusement
ébranlée (p.61).
Dans
le cadre d'un programme connu sous le nom de JOIDES
(programme d'échantillonnage profond commun aux instituts
océanographiques), et financé par la National Science
Fundation des Etats-Unis, le batiment de forage
Glomar Challenger entreprit une série d'expéditions
en prenant à son bord successivement différentes
équipes scientifiques internationales. Un système
unique de postionnement dynamique, controlé par ordinateur,
maintenait le navire immobile dans des eaux trop rofondes pour
qu'on put y jeter l'ancre. Il fut ainsi possible d'obtenir, par
des fonds supérieurs à 6000 mètres, des carottes
de sédiments de plus de 1000 mètres, ce qui constituait
un extraordinaire exploit technologique.
(p.99)
Réflexions
sur une révolution scientifique
in Hallam,
A. (1976). Une révolution dans les sciences
de la Terre. Editions du Seuil, pp. 151-165.
Kuhn
s'oppose à l'idée traditionnelle selon laquelle
le progrès scientifique
consisterait en l'accumulation progressive de découvertes
et d'inventions. Kuhn considère que les révolutions
scientifiques se font par la substitution d'un paradigme, c'est-à-dire
d'une conception du monde, à un autre. (p.153) [...] L'acquisition
d'un paradigme est un signe de maturité dans le développement
d'une science. Faute de cette acquisition, les faits sont rassemblés
au gré du hasard et les preuves ne peuvent avoir qu'un
très faible poids. Dans ces conditions, la simple accumulation
de données ne produit souvent rien de plus qu'un chaos
informe. [...] En ce qui concerne les sciences de la Terre, il
est clair que c'est la tectonique des plaques qui constitue, à
l'heure actuelle, le paradigme dominant.
Si l'on veut caractériser cette révolution conformèment
à la définition de Kuhn, il est nécessaire
de déterminer à quel paradigme la tectonique des
plaques est venue se substituer [...]
Considérons
par exemple la question de l'orogenèse. Au début
du siècle, les chercheurs hostiles à l'hypothèse
de la dérive des continents adoptaient sur cette question
des points de vue divers et inconciliables entre eux. (p.154)
[...] Le seul point commun qui ressort de ce salmigondis d'opinions
est une conception de la Terre "stabiliste"
et non mobiliste, qui attribue aux continents
une position relativement immuable. Dans la mesure où c'est
Wegener [...] qui le premier mit en doute le bien-fondé
de cette hypothèse, on est en droit de considérer
que cette révolution comença au tout début
de ce siècle. Cependant, cinquante ans devaient s'écouler
avant que de nouvelles preuves et de nouvelles idées amènent
la communauté scientifique à opter pour le point
de vue mobiliste et permettent la pleine formulation du nouveau
paradigme (p.155).
[...]
On peut certes s'interroger sur la signification de "révolutions"
qui mettent parfois un demi-siècle à aboutir, guère
plus rapides donc que d'autres modes, plus modestes, de transformation
de la pensée et de la technique (p.156). [...] Ferme partisan
d'une étude pluridisciplinaire de la Terre, Wegener soutenait
que, vu l'impossibilité de soumettre les hypothèses
géophysiques à des expériences déterminantes
ainsi qu'on le fait en physique, il convenait d'accumuler des
preuves glanées dans les domaines les plus divers, et dont
aucune à elle seule n'autrait été concluante.
(p.157-158). [...] Un des obstacles les plus sérieux fut
sans doute l'absence, surtout en ce qui concerne les océans,
de certaines preuves qui d'une manière ou d'une autre,
cela est apparu clairement ces dix dernières années,
étaient propres à lever les derniers doutes sur
l'interprétation de Wegener. C'est ainsi que certains régions
parmi les plus importantes, telles que l'Afrique du Sud ou l'Amérique
du Sud, étaient inaccessibles à la majorité
des géologues, à une
époque où les crédits de mission étaient
infiniment moins importants qu'aujourd'hui ; les
chercheurs étaient donc contraints d'accepter de confiance
bon nombre d'affirmations.
Cela
ne saurait pourtant suffire à expliquer l'accueil hostile
que rencontra sur le champ l'hypothèse de la dérive
des continents [...] Aussi convient-il d'aller plus au fond des
choses et de reconnaitre que le véritable obstacle au triomphe
de Wegener n'était pas tant l'insuffisance des données
qu'une certaine Gestalt de la Terre : le paradgime stabiliste.
En effet, les
données les plus immédiates, par exemple la forme
des continents, peuvent être équivoques suivant
le point de vue, statique ou mobiliste, que l'on adopte.
[...]
les arguments géophysiques avancées par Jeffreys
pour rejeter la dérive des continents étaient
étayés par des observations quantitatives et par
une connaissance en apparence supérieure des propriétés
physiques de la Terre. On ne peut manquer d'être frappé
par l'analogie entre cette situation et la controverse sur l'âge
de la Terre qui opposa Lord Kelvin et les géologues de
la fin du siècle dernier et dans laquelle le prestigieux
physicien continua à avoir le dessus jusqu'à la
découverte de la radioactivité des roches. [...]
la théorie de Kelvin, selon laquelle la Terre devrait nécessairement
se refroidir du fait qu'elle rayonne de la chaleur [...] fut finalement
réfuté par l'importante découverte d'un autre
physicien de premier rang [...] Rayleigh fit état, en 1906,
de la découverte du radium
dans un grand nombre de roches provenant des parties
les plus variées de la planète. Une morale possible
de cette histoire est que seul un
physicien peut réfuter un autre physicien,
parce qu'ils parlent le même langage (p.160). [...] En l'absence
d'un mécanisme plausible de la dérive des continents,
peu de géophysiciens pouvaient accepter de renoncer à
leur Gestalt stabiliste, si fragile fut la base empirique sur
laquelle ils la faisaient reposer. [...]
Une
raison supplémentaire de l'hostilité que rencontra
Wegener provient du caractère pariel des critiques que
lui adressaient ses collègues, qui ne s'occupaient en général
que de ce qui touchait à leur propre spécialité.
A lire la littérature d'entre-deux-guerres, on s'aperçoit
imédiatement qu'il n'existait
pratiquement aucune communication, par exemple, entre les géophysiciens
et les biologistes (y compris paléontologues).
Seul un étranger à ce dernier domaine, tel que Wegener,
pouvait observer que l'idée des passerelles continentales,
chère à ces derniers, était indéfendable,
mais qu'il fallait néanmoins trouver le moyen d'expliquer
les ressemblances de la faune et
de la flore d'un continent à l'autre.
Deux
conceptions différentes
de la nature de la pensée scientifique
ont prévalu successivement au cours du temps. La conception
la plus traditionnelle [...] représente la science comme
une démarche essentiellement
inductive, qui part des faits pour aboutir à
des théories générales [...] une conception
de la science comme activité de rassemblement et de classification
des faits. Bien au contraire, une science est d'autant moins encombrée
de faits qu'elle a atteint un plus grand degré de maturité.
A mesure qu'une science progresse, les faits s'intégrent
de mieux en mieux à des principes généraux
d'une plus grande portée explicative [...] il n'est plus
besoin d'enregistrer la chute de chaque pomme. D'où la
seconde conception [...] qui considère la science comme
fondamentalement hypothético-déductive.
A partir des insuffisances de telle théorie traditionnelle;
le scientifique formulerait une autre hypothèse pour expliquer
les données existantes et en déduirait des conséquences
qui seraient alors soumises à vérification. Cette
conception rend certes beaucoup mieux compte de la nature effective
du progrès scientifique et se rapproche étroitement
de la méthode de Wegener lui-même [...] L'image véritable
de ce qu'est la pensée scientifique est moins simple, mais
plus intéressante ; elle est liée à la
transformation de [...] paradigmes par la constitution de modèles
théoriques, soumis à diverses conditions de "plausibilité",
et ne peut etre considéréee hors du rapport qu'elle
entretient avec toutes sortes de facteurs sociaux.
[...] l'une des principales difficultés rencontrées
par Wegener tient certainement au fait qu'il n'était pas
reconnu comme faisant partie de la communauté des géologues
professionnels [...] La théorie de la tectonique des plaques,
fondée sur l'hypothèse de la dérive des continents,
a remarquablement réussi à donner une explication
cohérente de nombreux phénomènes géologiques
et à offrir une représentation de l'évolution
de la Terre plus intelligible que toutes celles dont on disposait
jusque là. Il faut voir en elle le plus important progrès
qui ait eu lieu dans le domaine des sciences de la Terre depuis
qu'au début du XIXè siècle, le paradigme
de l'évolution uniforme et celui de la corrélation
stratigraphique fondée sur l'étude des fossiles
avient donné à la géologie le rang de science
véritable. Selon les critères habituels de précision,
de généralité, de valeur explicative et de
vérifiabilité, la tectonique des plaques apparait
comme une théorie scientifique de très haute valeur
[...] (p.163-165)
|
Article précurseur
de Holmes (1929).
L'histoire
des idées mobilistes et du modèle de la tectonique
des plaques.
D'après Savaton, P. (2011). Histoire des sciences
et enseignement du modèle de la tectonique des plaques.
Revue RDST n° 3 : Didactique des sciences et histoire des
sciences, p. 107-126
La filiation n'est
pas directe entre le modèle de déplacement des
continents à la surface des océans construit par
Wegener et le modèle de la tectonique des plaques qui
ne prend corps qu'une fois la surface du globe pensée
en terme de plaques lithosphériques mobiles. Ce rapprochement
peut etre source de confusions et de difficultés didactiques.
L'histoire de la mobilité des continents ne peut être
présentée en faisant l'impasse sur le XIXe siècle,
et sur les modèles tectoniques d'Elie de Beaumont
puis d'Eduard Suess (1897) auquel se référe explicitement
Wegener. Le modèle de Suess fait donc
partie du contexte et il s'inscrit dans le cadre paradigmatique
de la géologie d'alors et notamment celui de la théorie
du refroidissement séculaire. Wegener s'inscrit dans
une histoire des idées, dans la continuité des
discussions de la communauté géologique sur l'origine
des montagnes mais il s'y inscrit de manière originale
par sa démarche.
Le modèle
de Suess rajoute à la tectonique verticale développée
par Elie de Beaumont, une tectonique tangentielle, secondaire,
mais génératrice de plissements et responsable
de la formation des chaines de montagnes. Il définie
le terme de Gondwana comme un super continent carbonifère,
une unité géographique ancienne sur des critères
paléontologiques et divise verticalement le globe en
trois couches concentriques (sial, sima et nife). Suess voyait
dans la séparation actuelle des continents l'expression
des effondrements continentaux déjà proposés
par Elie de Beaumont, en relation avec le refroidissement séculaire
et la contraction thermique.
Le
modèle de Suess est donc incompatible avec celui de l'isostasie
de Dutton
selon lequel la contraction thermique est insuffisante pour
créer les reliefs observés à la surface
du globe. Fisher développera un modèle d'équilibre
isostatique où les continents allégés par
érosion remonteraient tandis que les bassins océaniques
comblés par les sédiments s'enfondreraient. La
théorie de l'isostasie de Dutton prétendait unifier
la géologie et la géophysique et permet de maintenir
la permanence des océans et des continents, en réduisant
le théorie de la contraction au moins dans la communauté
anglo-saxonne qui y était déjà peu favorable.
Wegener va poser
la mobilité horizontale comme une nécessité
explicative et unificatrice d'un ensemble d'observations convergentes,
parfois anciennes, parfois récentes.Il met en avant l'existence
d'unités géologiques continentales qui semblent
interrompus par la mer et cherche à démontrer
qu'il ne peut s'agir d'un hasard. Il expose sa théorie
contre celle des continents submergés, acccepté
durablement selon lui uniquement parce qu'elle s'opposait à
la théorie de la permanence des océans.
Ses deux communications
de janvier 1912, publiés quelques mois plus tard dans
des revues allemandes de rang
international, sont prolongées par son
ouvrage de 1915. L'ouvrage traduit en français en anglais,
en russe, en suédois, largement lu et discuté,
surtour à partir de 1924 par la large diffusion de la
traduction anglaise et par sa présentations dans les
revues Nature, Science et Geological Magazine.
Son rejet, surtout par la communauté géologique
et géophysique américaine, est l'expression d'une
oppostion paradigmatique et épistémoliogique fondamentale
et pas seulement la conséquence d'un argumentaire insuffisant
(Oreskes, 1999). Il n'y a pas selon lui de permanence des
océans et des continents comme le défend
la communauté des géologues américains
depuis le milieu de XIXe siècle selon les thèses
de Dana.
Wegener réconcilie
dans son modèle la théorie de l'isostasie de Dutton
et le modèle de super-continent et de contraction thermique
de Suess :
Si
nous prenons comme base la théorie des translations,
nous répondons à toutes les exigences justifiées,
tant à celles de la loi des anciennes liaisons continentales
qu'à celles de la permanence. Nous n'avons qu'à
énoncer ces lois comme il suit : Ponts continentaux ?
Oui, non pas grâce à des continents intermédiaires
affaissés, mais à des socles continentaux jadis
contigus. Permanence ? Oui, pas de chaque continent ou océan
pris individuellement, mais permanence de la surface océanique
totale et de la surface continentale totale prises en bloc
(Wegener, La genèse des contients et des océans,
p.21)
Son modèle
n'est donc pas totalement nouveau (Oreskes, 1999). Ce qui est
tout à fait original et en rupture, c'est la
réconciliation de deux théories.
Le Gondwana de Wegener se fracture et les blocs divergent, là
où Suess faisait s'effondrer des masses continentales
à l'emplacement des océans actuels. Dans le cadre
des théories marquées par
la permanence des océans et des continents du coté
américain, et par la
théorie de la contraction du coté européen,
la seule explication aux distributions
de faunes et de flore ne pouvait venir que de
l'existence de continuités continentales.
La
découverte de la radioactivité,
en reconsidérant le paradigme du refroidissement séculaire,
va poser un sérieux problème aux paléontologues.
Wegener va opposer l'isostasie aux ponts continentaux pour laisser
la place aux translations continentales, tout en réduisant
la théorie de la permanence incompatible avec les observations
paléontologiques et le cadre évolutionniste. Si
la naissance d'une idée nouvelle est difficile, c'est
aussi parce qu'elle n'est pas seule et qu'elle doit faire avec
ou contre un héritage et d'autres possibles, qui viennent
la contester et tenter de la réduire.
L'idée d'une
terre solide et rigide est une idée dominante du XIXe
siècle, défendu notamment par Thomson
(1862) en lien avec l'absence de marées crustales. L'astronomie
physique imposait une rigidité terrestre. Fisher
en 1881 contesta cette idée car si la croute était
rigide parce que froide et la noyau solide pour cause de pression,
entre les deux, il pouvait exister une couche fluide, permettant
d'expliquer l'isostasie grace à un substratum crustal
plastique. La communauté géophysique est donc
partagée sur le modèle de Terre plus ou moins
rigide lorsque Wegener présente sa théorie.
L'idée de
la mobilité horizontale de Wegener va s'appuyer sur l'idée
d'une isostasie et d'une Terre pas entièrement solide.
Wegener en fera le processus central de sa théorie, avec
un déplacement conceptuel des mouvements continentaux
verticaux (isostasie) vers des mouvements horizontaux. Ce déplacement
n'est pourtant pas acceptable car il viole les
conditions de validité du modèle isostatique
: les mouvements horizontaux opposaient aux déplacements
de la croute rigide, une croute océanique adjacente également
rigide. Wegener contournera le problème en calculant
sur des arguments gravitaires que la croute continentale était
plus épaisse que la croute océanique adjacente
et de ce fait, pouvait se déplacer à 95% face
au substratum plastique de la croute océanique. Malgré
cet argumentaire, si les mouvements verticaux renvoyaient aux
forces gravitaires, il restait à trouver les forces responsables
de la dérive horizontale. Pour nombre de géophysiciens,
l'absence de cause identifiée
avec assurance conduit à rejeter le modèle des
translations.
La théorie
de Wegener arrive à l'époque où le modèle
sismique de Terre est en construction. Jeffreys
défend une Terre solide au motif qu'une rupture n'est
possible qu'au sein d'un corps rigide et qu'il en est de même
pour la transmission des ondes de cisaillement. L'existence
de séismes impose donc une rigidité terrestre,
fait que ne partage pas Gutenberg qui met en
évidence en 1927 une zone de faible vitesse sismique
vers 100 km de profondeur et propose l'existence de courants
de convection au sein d'un manteau plastique. Mais le modèle
de Jeffreys (1924) bénéfice d'une
diffusion très large grâce au statut de
son auteur, professeur à Cambridge, et
au succès universitaire de son traité de géophysique,
publié en 1924, réédité pendant
près de 50 ans comme un ouvrage de référence
.
|
a |
Modèle
contractionniste,
modèle
permanentiste... et
modèle translationniste
Histoire du contexte épistémologique dans lequel s'inscrit
l'hypothèse de la dérive des continents
D'après
Deparis, V. & Thomas, P. (2011). La
dérive des continents de Wegener. Site Planet-Terre,
ENS Lyon.

Source : livre de Géologie de classe de 4ème,
V. BOULET, 1925, modifié |
Dans
la théorie d'Elie de Beaumont
(1829), le refroidissement séculaire de la Terre
entraînerait sa contraction thermique, la diminution
de son rayon et de son volume, d'où le plissement
de sa surface. |
|
Remarque
de G. Gohau, G. (1990). Une historie
de la géologie. Editions du Seuil, p.175 :
Dans l'exposé que l'on fait aujourd'hui de
cette ancienne théorie, on aime, pour des raisons
pédagogiques, à comparer la contraction
de l'intérieur du globe au déssechement
de la pomme qui se flétrit, et le ridement de l'écorce
à celui de la pelure du fruit. Cela suggère
que les "systèmes de montagnes" se forment
au hasard, comme les rides de la pomme. Hors, il n'en
est rien dans la théorie d'Elie de Beaumont.
C'est même tout le contraire, au point qu'un de
ses contemporains utilisait l'analogie avec le flétrissement
de la pomme... pour montrer qu'une sphère qui se
contracte se ride de façon aléaotaoire et
non suivant des directions déterminées.
Elie de Beaumont, en effet, attache une impoorantce primordiale
à la direction des chaines de montagne. Il va même
progressivement élaborer un schéma très
complexe connu sous le nom de réseau pentagonal
[...]. |

Carte des aires continentales. In É. Haug, Les géosynclinaux
et les aires continentales,
Bulletin de la Société géologique de France,
3e série, 28, 617-711, 1900, p.642.
Y avait-il
à l'époque des ponts, ou bien les continents étaient-ils
séparés comme de nos jours par de larges océans
? Il est impossible d'écarter la nécessité
de l'existence des anciennes jonctions terrestres, si nous ne
voulons pas renoncer complètement à comprendre
le développement de la vie sur le globe, et il est également
impossible de se dérober aux arguments contraires à
l'existence des continents intermédiaires émis
par les partisans de la loi de la permanence. Il n'y a évidemment
qu'une issue : Les hypothèses admises comme évidentes
doivent être viciées par des erreurs cachées
». Alfred
Wegener, La genèse des continents et des océans,
op. cit., p.16-17.
"Si
nous prenons comme base la théorie des translations,
nous répondons à toutes les exigences justifiées,
tant à celles de la loi des anciennes liaisons continentales
qu'à celles de la permanence. Nous n'avons qu'à
énoncer ces lois comme il suit : Ponts continentaux ?
Oui, non pas grâce à des continents intermédiaires
affaissés, mais à des socles continentaux jadis
contigus. Permanence ? Oui, pas de chaque continent ou océan
pris individuellement, mais permanence de la surface océanique
totale et de la surface continentale totales prises en bloc"
Alfred
Wegener, La genèse des continents et des océans,
1928 ; réédition, Paris, C. Bourgois, 1990, p.21).

Fig.
2 : « Die Entstehung der Kontinente », Geologische
Rundschau, 3, 1912, p. 279.
Les continents de sal (ou sial) reposent sur une couche plus
dense de sima.
La Terre contient un noyau de nife.
|
Entre
1883 et 1909, Eduard Suess fait entrer les sciences
de la Terre dans une ère nouvelle en développant
une vision globale de la tectonique de surface. Il s'appuie sur
une grande quantité d'observations et cherche à
faire ressortir les traits fondamentaux de la planète,
prise dans son ensemble. "M. Suess a su s'élever
assez haut pour voir les traits fondamentaux de l'ensemble s'accuser
au milieu de la complexité des détails »
(in E. Suess, La Face de la Terre, Préface de Marcel Bertrand,
tome I, 1883 ; traduction française, Paris, Armand Colin,
1905, p.vi).
L'étude
des chaînes de montagnes permet à Suess d'affirmer
l'existence de mouvements verticaux et horizontaux importants.
Dès 1875, il reconnaît que la chaîne alpine
est déversé sur un « avant-pays » et
il postule l'existence d'une poussée venue du Sud ou du
Sud-Est avec des déplacements tangentiels importants. En
1883, il écrit : « Les dislocations visibles
dans l'écorce terrestre sont le produit de mouvements qui
résultent de la diminution du volume de notre planète.
Les efforts développés par l'effet de ce phénomène
tendent à se décomposer en efforts tangentiels et
en efforts radiaux, et par suite en mouvements horizontaux (c'est-à-dire
en poussée et en plissements) et en mouvements verticaux
(c'est-à-dire en affaissements) ".(E. Suess,
La Face de la Terre, op. cit., p.139). Le moteur des mouvements
superficiels reste la contraction thermique (comme pour Elie
de Beaumont) qui n'empêche pas des mouvements latéraux
importants.
Suess
compare également les séries
stratigraphiques et les faunes et les flores fossiles
d'un continent à l'autre. Certaines régions aujourd'hui
séparées par des océans possédent
une faune fossile commune. Ces similitudes entre des manifestations
anciennes de la vie sont impossibles à expliquer selon
la théorie darwinienne de l'évolution si on n'admet
pas l'existence de liaisons intercontinentales aujourd'hui effondrées.
Les mers intérieures et les vastes océans se sont
formés puis agrandis par des affaissements successifs.
Cette idée lui permet également d'expliquer les
transgressions et régressions marines. Lorsque l'écorce
s'effondre brutalement, la mer fait de même (régressions).
Le comblement progressif des mers amène les transgressions.
En
1900, Emile Haug donne des arguments
géologiques et paléontologiques
qui militent en faveur de l'existence d'anciennes unités
continentales. Les
chaînes de montagnes se forment uniquement le long de bandes
étroites (les géosynclinaux) intercalées
entre des unités continentales stables. "Chaque
unité continentale a eu sa faune propre tant qu'elle est
restée isolée, que des migrations se produisent
chaque fois que des communications par terre s'établissent
avec une unité voisine et que la faune la mieux organisée
dans la lutte pour l'existence arrive à s'implanter et
à refouler la faune autochtone dans les parties plus reculées
du continent. Si plus tard l'unité continentale est morcelée
par un effondrement partiel, les résidus de faunes permettront
de rétablir par la pensée l'ancienne connexion.
On voit quels services précieux peut nous rendre l'étude
des faunes terrestres dans les essais de reconstitution des continents
morcelés »
[...]
le modèle contractionniste
mis en avant par Suess [...] explique
les analogies de faunes et de flores et les ressemblances géologiques
entre des continents aujourd'hui séparés
par des océans par l'effondrement de ponts continentaux.
D'un autre côté, notamment au États-Unis,
les géologues privilégient le
modèle permanentiste, développé à
partir de 1846 par Dana. Ils considèrent
que les océans et les continents constituent des figures
permanentes de la surface du globe depuis son origine et insistent
sur les différences de nature entre les deux structures.
Au
début du XXe siècle, les
études sur l'équilibre isostatique des continents
montrent que ceux-ci peuvent être considérés
comme des blocs légers d'un composé nommé
alors sial (car composés essentiellement de silicium et
d'aluminium) en équilibre sur une couche plus dense d'un
composé nommé alors sima (roches composées
essentiellement de silicium et de magnésium) qui affleure
au niveau des océans. Ces travaux favorisent le modèle
permanentiste aux dépens du modèle contractionniste.
Comment en effet pourrait-on postuler que des parties continentales
légères puissent s'enfoncer au niveau des fonds
océaniques plus denses ? Mais chaque nouvelle donnée
paléontologique
devient une preuve de l'existence d'une liaison intercontinentale,
et renforce le modèle de Suess au détriment de celui
de Dana.
[...]
La théorie
de Wegener découle [...] des incohérences des théories
précédentes, qui apparaissent [...] lorsqu'on réunit
les différentes disciplines des sciences de la Terre. [...]
[...] Les continents, autrefois réunis en une seule masse
continentale nommée Pangée, se sont dispersés
pour atteindre leur position actuelle en fendant le sima qui les
entoure. Il lie l'orogenèse au déplacement des continents,
ce qui lui permet de donner une explication unifiée du
relief terrestre. D'une part, il affirme que les chaînes
de montagnes intracontinentales [...] naissent de la collision
entre deux socles continentaux et, d'autre part, il expose [...]
que la dérive des continents à travers le sima forme
par compression des chaînes de montagne à leur «
proue » (les Rocheuses ou la Cordillère des Andes)
et laisse derrière eux (à leur « poupe »)
des fragments à l'origine des guirlandes d'îles (Antilles,
archipels japonais, Ouest-Pacifique...).
[...]
La démonstration [...] résulte d'une accumulation
d'indices provenant d'observations diverses. |
Quelles
différences entre dérive des continents et tectonique des
plaques ?
D’après Deparis, V. & Thomas, P. (2011).
La dérive des continents de Wegener. Article en ligne
sur le site Planet-Terre, ENS Lyon.
|
Dans
le modèle de la dérive des continents |
Dans
le modèle de la tectonique des plaques lithosphériques |
Continent
ou Lithosphère |
les
continents sont assimilés à des bateaux (constitués
de sial) dérivant sur un océan (constitué
de sima)
|
la
notion de sial demeure, même si son nom a changé
: c'est la croûte continentale. La notion de sima, roche
riche en silicium et magnésium est devenue plus complexe,
puisqu'elle recouvre croûte océanique et manteau
dans son ensemble.
les
continents peuvent toujours être considérés
comme des bateaux pris dans (ou plutôt posés sur)
une banquise de glace, banquise qui dérive sur l'océan
en entraînant avec elle les bateaux.
les
bateaux sont constitués de la lithosphère continentale
(et non plus de la simple croûte), la banquise est constitué
de la lithosphère océanique (et non pas de la seule
croûte), et l'océan correspond à l'asthénosphère
et au manteau inférieur. |
Moteurs |
les
forces proposées pour expliquer la dérive sont extérieures
aux continents, appliquées sur le continent, que ce soient
la force d'Eötvös, les courants de convection dans le
sima.
|
la
force qui met en mouvement la lithosphère est à
rechercher dans la lithosphère elle-même (son refroidissement
est à l'origine de sa plongée et est donc le moteur
de la convection mantellique). |
Pangée
primordial ou transitoire |
les
continents actuels dérivent de la fragmentation d'une Pangée,
supposée (au moins implicitement) primordiale, ayant toujours
existé.
|
la
Pangée permo- carbonifère résulte du rassemblement
de nombreuses masses continentales qui se séparent et se
rassemblent au grès de ruptures et de subductions/collisions,
les traces des collisions ayant fabriqué la Pangée
permo-carbonifère étant les chaînes hercynienne
et ouralienne. |
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Quels
thèmes
à enseigner aux élèves sur
la nature des sciences
What ideas about science shoud be taught ?
D'après
Bartholomew, H., Osborne,
J.F., Ratcliffe, M. (2002). Teaching pupils ‘ideas-about-science’:
case studies from the classroom.
Annual Conference of the National Association for Research in Science
Teaching (NARST), New Orleans, April 7-10 2002.
NATURE OF SCIENTIFIC KNOWLEDGE
|
Status
of Scientific Knowledge
|
Students should
be taught that scientific knowledge produces reliable
knowledge of the physical world and has a number of attributes.
Scientific knowledge aims to be general and universal,
it can be reductionist and counterintuitive, and it has
intrinsic cultural value. Scientific explanations are
based on models and representations of reality. |
Historical
Development
of Scientific Knowledge
|
Pupils
should be taught some of the historical background to
the development of scientific knowledge. |
Public
perceptions of science Conceptions of risk and uncertainty
|
Students need to be taught
that common public perceptions of science perpetuate a number
of myths which give erroneous impressions of the methods and nature
of science. An understanding of the basic concepts associated
with risk and uncertainty. |
Science
and Certainty
|
Pupils
should appreciate why much scientific knowledge, particularly
that taught in school science [and school texts], is well-established
and beyond reasonable doubt, and why other scientific
knowledge is more open to legitimate doubt. It
should also be explained that current scientific knowledge is
the best we have but may be subject
to change in the future, given new evidence
or new interpretations of old evidence. |
Reporting
Scientific Findings
|
Students should be taught
that scientists use distinctive forms of communication
for reporting results which are reliant on a range of different
genres and semiotic modes |
Scientific
Knowledge and Values
|
Students should be taught
that scientists perceive and claim their work to be value free
and objective. This assumption is open to challenge |
METHODS of SCIENCE
|
Scientific
Methods and Critical Testing*
|
Pupils
should be taught that science uses the experimental method
to test ideas, and, in particular, about certain basic
techniques such as the use of controls. It should be made clear
that the outcome of a single experiment is rarely sufficient
to establish a knowledge claim. |
Analysis
and Interpretation of Data*
|
Pupils
should be taught that the practice of science involves
skilful analysis and interpretation of data. Scientific
knowledge claims do not emerge simply from the data but through
a process of interpretation and theory building
that can require sophisticated skills. It
is possible for scientists legitimately to come to different interpretations
of the same data, and therefore, to disagree. |
Hypothesis
and Prediction*
|
Pupils
should be taught that scientists
develop hypotheses and predictions about natural phenomena.
This process is essential to the development of new knowledge
claims. |
Diversity
of Scientific Thinking*
|
Pupils should
be taught that science uses a range of methods and approaches
and that there is no one scientific method or approach. |
Creativity* |
Pupils
should appreciate that science is an activity that involves creativity
and imagination as much as many other human activities,
and that some scientific ideas are enormous intellectual achievements.
Scientists, as much as any other profession, are passionate
and involved humans whose work relies on inspiration
and imagination. |
Science
and Questioning* |
Pupils
should be taught that an important aspect of the work of a scientist
is the continual and cyclical process of asking questions
and seeking answers, which then lead to new questions.
This process leads to the emergence of new scientific
theories and techniques which are then tested empirically. |
Observation and
Measurement
|
Students should be taught
that observation and measurement are core activities of scientists;
most measurements are subject to some uncertainty but there may
be ways of increasing our confidence in a measurement |
Specific Methods
of Science
|
Students should be taught
a range of techniques for data representation and analysis commonly
used in the sciences, with particular emphasis on those necessary
for interpreting reports about science, particularly those in
the media |
Science and Technology
|
Students should be taught
that although there is a distinction between science and technology,
the two are increasingly interdependent as new scientific discoveries
are reliant on new technology and new science enables new technology |
Cause and Correlation
|
Students should be taught
that there are two types of distinctive relationship in science:
causal, in which there is a known mechanism relating an effect
to a cause, and a correlation, in which identified variables are
associated statistically but for which there is no well-established
causal link |
SOCIAL PRACTICES IN SCIENCE
(Teachnig SSI)
|
Moral and Ethical
Dimensions
in Development of Scientific Knowledge
|
Students should appreciate
that choices about the application of scientific and technical
knowledge are not value free; they may therefore conflict with
moral and ethical values held by groups within society |
Cooperation
and Collaboration in the Development of Scientific Knowledge*
|
Pupils
should be taught that scientific work is a communal and
competitive activity. Whilst individuals may make significant
contributions, scientific work is often carried out in
groups, frequently of a multidisciplinary and international nature.
New knowledge claims are generally shared and, to be accepted
by the community, must survive a process of critical peer
review.
(see Merton, 1973). |
Peer Review |
Students should be taught
that developments In scientific knowledge are critically reviewed
and may be authenticated and validated by members of the wider
community |
Contextual Nature
of Science
|
Students should know that developments in scientific
knowledge are not undertaken in isolation, but may be shaped by
particular contexts
(see Pestre, 2006) |
Constraints on
Development of Scientific Knowledge
|
Students should know that scientific knowledge
is developed within the context of a range of constraints that may
shape it and its uses |
Range of Fields
in Which Scientific Knowledge Is Developed
|
Students should be taught
that scientific research is undertaken in a variety of institutions
by individuals who have differing social status within the scientific
community. Scientists generally have expertise only in one specific
subdiscipline of science |
Accountability
and Regulation of Scientific Practices |
Students should be taught
issues of accountability and regulatory procedures that relate
to the development of scientific knowledge |
References
-
-
Bartholomew,
H., Osborne, J.F., & Ratcliffe, M. (2002, April). Teaching
pupils ‘‘ideas-about-science’’: Case
studies from the classroom. Paper presented at the
75th International Conference of the National Association
for Research in Science Teaching, New Orleans. Available
on-line here.
-
Osborne
J., Collins S, Ratcliffe M., Millar R., Duschl R. (2003).
What ‘‘Ideas-about-Science’’ Should
Be Taught in School Science? A Delphi Study of the Expert
Community. Journal of Research in Science Teachnig,
Vol. 40, No. 7, pp. 692–720.
This study
has shown that within the broad community with an interest or
engagement in science and science education, there exists a
consensus about the core features of an account of the nature
of science. It therefore suggests that one common obstacle to
teaching about science is without foundation. Hence, we see
this work as providing another body of empirical evidence to
buttress the case for placing the nature of science and its
processes at the core rather than the margins of science education.
The detailed responses of the participants provide, in addition,
valuable pointers to the content of such teaching. Although
some may object that teaching a vulgarized account of science
runs the risk of misrepresenting the essential elements of scientific
practice and the values of the scientific community, we prefer
to stress the positive aspect of such an account: that it can
provide a basic understanding of the processes and practices
of science and of the nature of the knowledge that these produce.
Not only will such an account help young people make sense of
the science that impinges on them in their daily lives, it may
also lay the grounds from which a more sophisticated account
may be developed in later life.
|
Research
question
This
project [...] sought to provide empirical evidence of what the expert
community engaged in practicing, communicating, and teaching science
thought was important for average citizens to understand about socioscientific
issue [...] by the end of their formal education.
Rationale
and theoretical background
[...] the
core status of science can be justified only if it offers something
of universal value to all rather than academic science for the minority
who will become the next generation of scientists. Science courses that
give scant or tacit treatment of the nature, practices, and processes
of science result in most students leaving school with naive or severely
limited conceptions of science (Driver, Leach, Millar, & Scott,
1996). Yet it is an understanding of the nature of science which many
have argued is essential for the education of the future citizen (Fuller,
1997; Irwin, 1995; Jenkins, 1997; Millar, 1996; Ziman, 2000), and which
should be an integral and substantive element of any contemporary course
in science.
In most societies,
the normative view of what is significant and salient within a given
domain is defined by the academic community.
[...] as
Stanley and Brickhouse (2001, p. 47) pointed out, ‘‘although
almost everyone agrees that we ought to teach students about the nature
of science, there is considerable disagreement on what version
of the nature of science ought to be taught.’’
Somewhat paradoxically, then, despite this obstacle, a range of curriculum
documents [...] ostensibly seem to have achieved some agreement in defining
what should be taught about the nature of science. But do these curriculum
documents represent a consensus or, alternatively,
the kind of compromise which is often the product of reports
produced by committees? That is, do they represent the lowest
common denominator around which it is possible to achieve agreement
rather than any coherent account of the nature of science?
In the view
of this uncertainty and the lack of empirical evidence for consensus,
our essential research aim was to determine empirically the extent of
agreement among scientists, science communicators, philosophers and
sociologists of science, and science educators about those aspects of
the nature of science that should be an essential feature of the school
science curriculum:in essence, to make
a contribution toward resolving this apparent dichotomy between the
academic and educational community.
Conclusions
1. [...]
where individuals have thought extensively about the nature of science,
and about an account that should be offered to others, they have experienced
considerable difficulty in its specification.
[...] There has been little agreement
about what is core or absolutely essential to an understanding of science.
[...] In contrast,
our findings provide empirical evidence
of a consensus on salient features which are both significant and essential
components of any basic knowledge and understanding about science
and, in addition, uncontroversial within the relevant academic communities
with an interest in science and science education. These data suggest,
then, that these themes do have sufficient agreement to form the core
of a simplified account of the nature of science suitable for the school
science curriculum. Hence, our first conclusion is that there exists
support and broad agreement for a set
of nine clearly specified themes about aspects of the nature of science
which school students should encounter by the end of compulsory schooling.
2. Our second
conclusion, therefore, is that many of the aspects of the nature of
science represented by the themes have features that are interrelated
and cannot be taught independently of each other. This
finding suggests that, although the research process has required the
separation and resolution of these components to weight their significance
and import, there is no agreement that they should be communicated and
represented in that manner.
3. It is
also important to recognize that the de?nition of consensus we have
used has drawn an arbitrary line. Using the same criteria of a mean
rating of 4 and a stability of <33% shift between the two rounds,
over 50% of participants considered several
other themes to warrant inclusion in the curriculum.
Specifically, these were: Science and Technology (65%),
Moral and Ethical Dimensions in the Development of Scientific
Knowledge (61%), Empirical Base of Scientific Knowledge
(61%), Cumulative and Revisionary Nature of Scientific Knowledge
(61%), Observation and Measurement (56%), Characteristics
of Scientific Knowledge (52%), and Specific Methods
of Science (52%). This suggests that these data represent the
participants’ gradation of importance of the themes [...] the
nine themes represent the basic minimum that any simplified account
of science should address. The other themes, although significant, are
additional components to be included in more complex or more sophisticated
accounts [...].
Discussion
and Implications

A
tentative comparison of the most prevalent ideas about science
found in current National Curricula or National Standards (McComas
& Olson, 1998), i.e., ideas found in six or
more national curriculum documents, and those emerging from this
study. In the table, themes emerging from McComas and Olson’s
work that are similar to 10 themes emerging from this
work have been juxtaposed. |
Many
of the themes emerging from our study fall under the umbrella
of the Methods of
Science : Experimental Methods and Critical
Testing, Creativity, Science and Questioning,
Diversity of Scientific Method, and Analysis and Interpretation
of Data). Two
themes (Historical Development of Scientific Knowledge
and Science and Certainty) are aspects of the
Nature of Scientific Knowledge.
There
is only one under the heading of the
Institutions and Social Practices of Science.
[...]
why so many of the ideas of contemporary
scholarship about the nature of science are absent.
For instance, neither the themes emerging from this study nor
those of the national curriculum documents place much emphasis
on the role of theory, explanation,
and models. They do not, for instance, represent
a more contemporary view of science such as that offered by Giere
(1991), who portrayed science as a multidimensional interaction
among the models of scientists, empirical observation of the real
world, and their predictions.
[...]
We suggest that the omission of other components is simply owing
to the fact that they were regarded as too complex or too contentious
for inclusion.
[...]
One challenge is how such themes can become part of the instructional
sequence. To what extent, for instance, can these themes be taught
directly as part of discrete lessons or should they permeate all
science lessons.
Whereas
inquiry-based approaches, investigations, or practical work will
certainly address many of the themes in the Methods
of Science category, unless there is some careful
mediation on the part of the teacher across lessons to highlight
the methodologic features of these activities and their generic
nature explicitly, many aspects of a more accurate picture of
the nature of science may be glimpsed only partially, if at all,
by students.
see
Kolsto's comments (2012) on links
between IBSE and Teaching SSI
|

The 9 Themes
from phase 1 of this study that form the components of a simplified
or core account of the Nature of
Science. In Bartholomew,
Osborne, & Ratcliffe, 2002.

Five
factors that afforded or inhibited the teachers’
pedagogic performance to teach effectively about science.
They serve as a valuable analytical tool for analysing and explaining
the success, or otherwise, that individual teachers have when
confronted with teaching components of the nature of science.
In addition, we argue that they are an important means of identifying
salient aspects of pedagogy for initial and inservice training
of teachers for curricula that require the teaching of SSI.
see also Urgelli, ESERA,
2011 and HEP
Lausanne, 2012
|
The
next phase of work with 12 teachers (3 Grade 6, 4 Grade 8, and
4 Grade 10) has sought to explore these problems. With these
teachers we have attempted to see how the themes can become
an integral part of their teaching and the difficulties that
emerge (Bartholomew, Osborne, & Ratcliffe, 2002).
In this
paper, we report work undertaken with a group of 11 teachers
over a period of a year to teach aspects of the nature of science.
The teachers, who taught science in a mix of elementary, junior
high, and high schools, were asked to teach components of the
nature of science for which consensus had been established using
a Delphi study in the first phase of the project. Data were
collected through field notes, videos, teachers’reflective
diaries, instruments that measured their understanding of the
nature of science and the role of discussion in the classroom.
In addition, data were collected of their pupils’ understanding
of the nature of science, pre- and post-intervention, and that
for a control.
In this paper, drawing on a sample of the data we explore the
factors that afforded or inhibited the teachers’ pedagogic
performance in this domain. Using these data, we argue that
there are 5 critical dimensions that distinguish and determine
a teacher’s ability to teach effectively about science.
Whilst these dimensions are neither mutually independent nor
equally important, they serve as a valuable analytical tool
for analysing and explaining the success, or otherwise, that
individual teachers have when confronted with teaching components
of the nature of science. In addition, we argue that they are
an important means of identifying salient aspects of pedagogy
for initial and inservice training of teachers for curricula
that require the teaching of the nature of science (In
Bartholomew,
Osborne, & Ratcliffe, 2002).
For
me, the next phase of work with a french community of experts
in science education will explore how communication and didactic
factors could explain involvement on mediating and/or teaching
SSI (EUROPEAN PROJECT 2013-2014).

see
also Stoll, L., Bolam, R., McMahon, A., Wallace, M., & Thomas,
S. (2006). Professional learning communities: A review of the
literature. Journal of Educational Change,
7(4), 221-258.
International
evidence suggests that educational reform’s progress depends
on teachers’ individual and collective capacity and its
link with school-wide capacity for promoting pupils’ learning.
Building capacity is therefore critical. Capacity is a complex
blend of motivation, skill, positive learning, organisational
conditions and culture, and infrastructure of support. Put together,
it gives individuals, groups, whole school communities and school
systems the power to get involved in and sustain learning over
time. Developing professional learning communities appears to
hold considerable promise for capacity building for sustainable
improvement. As such, it has become a ‘hot topic’
in many
countries.
|
This survey of a
panel of diverse experts has produced results that raise several
issues about curriculum design,
instruction, and implementation.
Our view is that
the importance of this study lies in the fact that it provides
a body of empirical data drawn from a panel of experts which
challenges the case made by Alters (1997) that no singular consensual
view exists. Therefore, we contend that the
nature of science can no longer be marginalized on the basis
that there is little academic consensus about what should be
taught.
[...] at least within
the English curriculum, there is no treatment of one of the
major themes from the Delphi study: the Diversity
of Scientific Thinking. Few curricula have recognized
the fundamental division Rudolph (2000) made between historical
reconstruction and empirical testing. The latter, which is largely
the domain of the physical, chemical, and molecular sciences,
stands in contrast to the process of historical reconstruction
in which the intellectual product is an explanatory mechanism
for the chronologic sequence of past natural occurrences.
[...] school science
is dominated by the empirical and exact sciences of physics,
chemistry, and biology. Notable
for its absence, for example, is a treatment of correlational
methods which
provide the basic methodology of medical trials and which are,
moreover, a common feature of media reports of science. Hence,
our data and those of McComas and Olson suggest that there are
significant elements of a minimal
account of the nature of science missing from most curricula.
[...] teaching students
about the nature of science is as important as developing a
knowledge of its content, if not more so, these findings lend
support to the view that teaching
the nature of science needs to become a core rather than a marginal
part of the science curriculum.
Our findings further
suggest that it might be a mistake to attempt to delineate a
curriculum in terms of a requirement to teach the components
of the nature of science separately. Rather, its
teaching can perhaps best be addressed through sets of well-chosen
case studies
of either a historical or contemporary nature
and by more explicit reflection
and discussion of science and its nature—an aspect that
should emerge naturally from the process of scientific inquiry
that is a normal feature of much classroom practice.
Thus, the principal value of these, or any set of themes, would
be to act as a curriculum checklist to see that the activities
in the curriculum provide sufficient opportunity to introduce,
elaborate on, explore, and develop
students’ understanding of these components of science
and its nature.
see three items of
French curriculum of SSI in secondary
school science education (2010)
|
Design,
methods : a three-stage Delphi study
The method
chosen for eliciting the expert community’s view was a three-stage
Delphi study. The Delphi method aims to improve group decision making
by seeking opinions without face-to-face interaction and is commonly
defined as ‘‘a method of systematic
solicitation and collection of judgements on a particular topic through
a set of carefully designed sequential questionnaires, interspersed
with summarised information and feedback of opinions derived from earlier
responses’’ (Delbecq, Van de Ven, &
Gustafson, 1975).
Three features
characterize the Delphi method and distinguish it from other group interrogative
methods: anonymous group interaction and responses, multiple
iteration of group responses with interspersed feedback, and the presentation
of statistical analysis.
The Delphi
technique has four principal advantages
thought to be important in gaining the considered opinions of experts:
It uses group decision-making techniques, involving experts
in the field, which have greater validity than those made by
an individual.
The anonymity of participants and the use of questionnaires avoid
the problems commonly associated with group interviews: for example,
specious persuasion or ‘‘deference to authority,
impact of oral facility, reluctance to modify publicised opinions and
band-wagon effects’’ (Martorella, 1991).
Consensus reached by the group reflects reasoned opinions because
the Delphi process forces group members to consider logically
the problem under study and to provide written responses (Murray
& Hammons, 1995).
Opinions using the Delphi method can be received from a group of experts.
The main
disadvantages of a Delphi study are seen as: the length
of the process, researcher influence on the
responses owing to particular question formulation, and difficulty
in assessing and fully using the expertise of the group because they
never meet.
The implementation
of this Delphi study therefore attempted to take full account of the
perceived advantages while recognizing the disadvantages. For example,
as science educators, we (the researchers) have views on the teaching
of the processes and practices of science. It was important that these
views not impinge on participants’ responses. Therefore, little
guidance was given as to the expected content of responses in the first
round of the Delphi study. In the second and third rounds, care was
taken to ensure, as far as possible, that participants’
own words were returned and that participants had ample
opportunity to comment on any interpretation in our
conflation of their responses.
The Delphi
procedure seeks to establish the extent
of consensus or stability in the community and typically
ends after either consensus or stability of responses has been achieved.
Brooks (1979) identified consensus
as ‘‘a gathering of individual evaluations around
a median response, with minimal divergence’’
and stability
or convergence is said to be reached when ‘‘it becomes apparent
that little, if any, further shifting of positions will occur’’
(p. 378).
Sampling
Commonly,
the minimum number for a Delphi panel is considered to be 10 with reduction
in error and improved reliability with increased group size. However,
Delbecq et al. (1975) maintained that few new ideas are generated in
a homogeneous group once the size exceeds 30 well-chosen participants.
For this study, 25 experts engaged in the study of science and its communication
were recruited, although the final sample
was 23 owing to attrition in Round 1. There was, however,
no further attrition in the group across the next two rounds, reflecting
the commitment of individuals to the
process.
In this context,
we chose to define experts as those with
acknowledged expertise in communicating, using, or researching the processes
and practices of science. The common element shared
by the group was an interest in communicating ideas about science in
their writing, teaching, or other work—all in essence having an
experience of acting as ‘‘knowledge intermediaries’’
(Irwin, 1995) between science and its publics. Thus, we sought views
from leading scientists (n = 5); historians, philosophers, and sociologists
of science (n = 5); science educators (n = 5); and those engaged in
the public understanding of science or science communication (n = 5).
Criteria used in selecting experts included for scientist were Fellowship
of the Royal Society, and for philosophers, sociologists, and science
educators, books and publications of international repute. For science
communicators it was a combination of publications of international
repute or the holding of an eminent post within the field. Initially
20 people were approached by letter,
and only 1 scientist and 1 science communicator declined. Two other
individuals were recruited to replace them.
In the case of teachers, the notion of expert is not commonly agreed
upon. The major value of their views was a sense not only of what was
important for children to learn, but also what might be pragmatically
attainable. Therefore, we recruited 5 teachers who had achieved some
public recognition for their work such as individuals who had won national
awards for the quality of their teaching or were authors of science
textbooks in widespread use in the United Kingdom. In the event, after
the first round, 1 teacher and 1 science communicator dropped out, leaving
a sample of 23 in total. As is standard
in all such Delphi studies, none of the participants was aware of the
identity the other participants.
Design
of the Delphi Study and data analysis
*
Round 1
The first
stage of the study, begun in January 20??, was an open-ended
brainstorming session. Opinions were sought about why, how and what
essential ideas about teaching socioscientific issue should be taught
in the school science curriculum through the use of an open-ended questionnaire
which asked:
-
What,
if anything, do you think should be taught about the methods of science?
-
What,
if anything, do you think should be taught about the nature of scientific
knowledge?
-
What,
if anything, do you think should be taught about the institutions
and social practices of science?
For each
response provided, participants were requested to give as clear a description
of each idea as possible; to indicate a particular context where they
thought a person might and the idea useful; and to state why such knowledge
would be important for an individual to know. This first round of the
Delphi study elicited extensive comments from most participants.
All these responses were coded reflexively and iteratively by
two members of the research team using a computer-based qualitative
data analysis package (NUDIST NVivo, QSR International Pty Ltd, Victoria,
Australia) until a reliability of >80% was obtained. Thirty themes
emerged from this analysis and a summary was composed for each emergent
theme, capturing the essence of participants’ statements. Discussion
among four members of the research team resulted in agreed categorization
of the responses and wording of theme summaries.
 |
Figure
1 shows a summary for one theme, The Tentative Nature of Scientific
Knowledge, and some of the justifications provided by the
participants. Early in the process, the decision was made to summarize
the themes using language of an academic nature which was understood
by the overwhelming majority of the participants. Such language
has the advantage of offering economy and precision of meaning
that was thought important for communicating ideas precisely with
a minimum of misnterpretation. However, we recognize that, as
currently articulated, the ideas embodied in the themes would
have to be unpacked and elaborated for a practitioner audience.
This process resulted in the production of 30 themes grouped under
three major categories: The Nature of Scientific Knowledge,
the Institutions and Social Practices of Science, and the Methods
of Science.
Table
1 shows the titles of the themes grouped under these heading and
the summary statements used in Round 3 to capture their
meaning using key phrases articulated by the Delphi panel.
It also shows the mean and modal ratings and the standard
deviations (SD) in Rounds 2 and 3. |
*
Round 2

Figure
2. Nature of scientific knowledge: Revised version for Round 3
and participants’ comments from Round 2. |
The Round 2 questionnaire
presented the titles and summaries of the 30 themes, together
with representative anonymous comments obtained from individuals
in Round 1, an example of which is shown in Figure 1.
Participants
were requested to rate the importance of each theme to the compulsory
school science curriculum, as represented by the summary, on
a 5-point Likert scale, with a score of 5 representing
the highest degree of importance. In addition, they were then
asked to justify their rating and comment on how accurately
the title and wording of the theme reflected their understanding
of a specific feature of science. Participants were also invited
to comment and respond to the representative supporting statements.
Means, modes, and
standard deviations for each theme using the rating given on
the 5-point scale were calculated and are shown in Table 1.
A total of 8 themes had a mean
of >= 4, indicating at this early stage that they were viewed
by the panel as very important or important.
Of these 8 themes, 3 showed standard deviations of <1.0,
indicating a high level of consensus for these themes: Experimental
Methods and Critical Testing, The Tentative Nature of Scientific
Knowledge, and the Historical Development of Scientific Knowledge.
Many comments were
also made about the interrelated nature or similarities among
many of the themes. The outcome was a decision to merge three
pairs of themes, to split one theme and to modify the summary
statements of most themes to minimize overlap.
Figure 2 shows a
revised version of the theme presented in Figure 1.
|
*
Round 3
For the third
and final round, we decided to reduce the number of themes for consideration
by the panel to only the most highly rated themes from Round 2. This
action was taken because research literature on the Delphi method suggests
that, in studies where participants were required to complete lengthy
and detailed questionnaires, responses
to questions toward the end of the questionnaire tend to be less fulsome
and informative (Judd, 1971). Therefore, the research
team was concerned that participant fatigue
would result if the complete set of 28 ideas-about-science were included
in Round 3 of the study, affecting the level of detail in responses
toward the end of the questionnaire. Thus, only the themes with a mean
rating of >3.6 and/or mode of 5 were used for the third round, reducing
the number of themes in this round to 18.
The final
questionnaire of the Delphi study, distributed in May 20??,
presented the titles, revised summaries, and representative anonymous
supporting statements from participants for the top rated 18 themes
from Round 2, together with the mean and standard deviation calculations
of the ratings for each theme. Participants
were requested to rate again each theme, based on the
premise that it should be taught explicitly, to
justify their rating, and to comment on ways in which
the wording of the summary might be improved to reflect the essence
of each idea-about-science. Mean scores and standard deviations were
again calculated using the 1–5 response categories and are shown
in Table 1 (themes for Round 2 of Delphi study, including ratings given
in Round 2) :
------------------------------------------------------------------------------
EUROPEAN
PROJECT 2013
We will organise
delphi studies in order to put together different stakeholders such
as teachers, psychologists, engineers, doctors, representatives of industry
and so on, and fuse different voices, suggestions, values and ideologies
as a whole educational framework.
Methodic
Framework : Stepping stones should be based on various interest groups’
perspectives as well as available research literature. Hence, the project
will utilize both theoretical and empirical means to develop stepping
stones.
Task 1. Literature
Research about Learning and Teaching SSI
An extensive literature review will provide a theoretical basis (learning
goals, themes, effective teaching strategies, learning environments,
etc.) to develop stepping stones. The aim of this review is to reveal
what topics, themes, perspectives, learning goals, teaching methods,
materials are used and what best practices regarding contextualisation
of SSI into science education programmes exist. Further, this review
will contribute to the development of open-ended questions which will
be used in interviews with experts in the next stage.
-
Example
questions:
- What are the main characteristics of a SSI like climate change,
GMO, stems cells, exoplanets,... ?
- What learning goals should we use for SSI education? (ask interviewee
to explain their ideas about goals)
- There are some frequently used teaching methods such as problem
based learning, learning cycle, etc. Do you think that these methods
can effectively be used for SSI education? What methods should be
used?
-What strategies for evaluating students do you imagine ? (knowledge,
values, competences, argumentation...)
- What posture could take teachers in facing controversial SSI? (balanced,
neutral, involved,etc)
Task 2. Delphi
Study - Round 1: Interviews with Experts
conduct semi-structured interviews with four expert groups such as science
teachers (2 persons), science educators (2 persons), scientists in SSI
(2 persons) and experts on science in society (2 persons) in their countries.
In selecting scientists, all of possible SSI will be listed. The queries
developed during the literature review stage will be used in these interviews.
Task 3. Development
of Questionnaires
The leaders will develop a questionnaire including close-ended items
based on Round 1 Delphi report.
Task 4. Delphi
Study Round 2: Administration of Questionnaires
The sample
would include policy makers, representatives of NGO’s, scientists,
members of youth organizations, representatives of industry, curriculum
developers, science educators, teachers and, students (9 categories,
5 persons for each category).
Task 5. Global
Delphi Report and Learning Theoritical Framework (LTF) for
Teaching SSI
National Delphi Round 2 reports would be discussed on current situation
of SSI education. This approach would lead to develop a "LTF for
teaching SSI".
|