La maxime du philosophe chinois Confucius
(aux alentours de 500 av J.C.)

Dis-moi et j’oublierai, Montre-moi et je me souviendrai, Implique-moi et je comprendrai.

Quelle(s) postures pour une éducation thérapeutique du patient ?
Le poids des représentations


Benoît Urgelli
last up-date : 7-avr-22

Cours pour les étudiants en première année
Institut de Formation pour Masso-Kinésithérapie pour Déficients de la Vue
et Institut des Sciences et Techniques de Réadaptation
Université Lyon 1

voir aussi : Health and education (2013) et Projet de recherche sur l'hésitation vaccinale (2020)

 

Objectifs : Discuter des différents modèles d'éducation à la santé et de l'émergence dans les années 2010 de l'éducation thérapeutique du patient (ETP). Cette éducation peut prendre différentes formes, en fonction des représentations du soignant, de son patient, de la pathologie, des savoirs en jeu mais également de la vision de la fonction médicale, entre médecine réparatrice et médecine humaniste (Giordan, 2010a). Ces différentes représentations conduisent à l'adoption d'une diversité de modèles pédagogiques (Giordan, 2010b ; Morandi et La Borderie, 2001) et de postures éducatives dans le cadre de la relation soignant-patient.
En partant
de situations cliniques vécues, nous interrogerons les représentations du soignant (et nos propres représentations !) à propos de la place de l'information, de la connaissances médicales, des savoirs experts et d'une approche psychopédagogique (individuelle ou collective) dans la perception de la pathologie par le patient (et son entourage), et l'adoption de comportements autonomes et responsables en matière de santé (Fournier, 2018). Les situations étudiées interrogeront la posture éducativedu soignant face à des patients majeures ou mineurs, et/ou intellectuellement diminués. Quelle place accordée alors aux parents et/ou au conjoint dans l'éducation thérapeutique du patient ?

Il s'agit donc de conduire une réflexion éthique (notre conception du bien-agir) en formation initiale, et de prendre conscience des principes et des valeurs qui guident nos actions éducatives et médicales (réflexion morale). L'ensemble s'inscrit dans le tournant reflexif des praticiens (Vacher, 2011), où l'on apprend à réflehir dans l'action, chargé souvent d'affectivité, et sur l'action, pour prendre du recul, temporiser et se décentrer. Les situations étudiées sont des situations qui montrent des conflits de valeurs et de principes (dilemme éthique), et plus largement des dilemmes posturaux : il faut alors hiérarchier les valeurs pour décider de la "bonne action" à mener, et si cela est impossible, faire des compromis dans l'intérêt général !

Modalités d'évaluation : A partir de la présentation d'une situation clinique de votre choix, préciser quelle(s) stratégies d'action vous adopteriez, quelles postures éducatives et les principes qui les fondent ? Pourquoi cette situation clinique pose un dilemme postural au soignant ? Comment agiriez-vous ? Soit finalement :

  1. Expliciter le dilemme éthique et postural lié à la situation.
  2. Quelles autres informations vous seraient nécessaires avant de décider comment agir ?
  3. A partir des informations dont vous disposez, que feriez-vous à court, moyen et long terme ? Pourquoi ?
  4. Quelles nouvelles difficultés pourraient découler de votre décision ?

Bibliographie :

L'essentiel :


in Balcou-Debussche, 2012

  • 1. Histoire du programme d'ETP : un changement de posture et de référentiel de compétences

Durant la période 2005-2012, un changement de référentiels de compétence est mis en place, en s'appuyant sur un modèle médical d'éducation à la santé (Calas et Reynaud, 2012 ; Authier, 2017). Entre un modèle d'éducation biomédicale (celui de la médecine réparatrice) et un modèle d'éducation biospychosocial (de la médacinie humaniste, avec des approches psychopédagogiques et la prévention des risques, en plus de la prise en charge des soins) (Giordan, 2010a), le modèle de l'éducation thérapeutique des patients se répand dans le monde médical, s'appuyant sur une représentation socioconstructiviste des apprentissages.


voir aussi Morin (2008), à propos des 3 principes de la théorie de la complexité

  • 2. Les visées de l'ETP : injonction à l'autonomie et à la responsabilisation

Dans ce modèle éducatif, , la relation entre le patient et le soignant est au centre de l'attention. Les apprentissages sont supposés symétriques, l'un apprenant de l'autre. La relation vise à l'appropriation de connaissances et de pratiques, et elle se fonde sur une écoute empathique qui accepte que celui qui ne pense pas comme soi (Barrier, 2009). Loin du paternalisme ou encore du technicisme, cette approche biopsychosociale est supposée nécessaire à une acceptation créative de la norme de santé et la défintion d'un art de vivre (Ganguilhem, G. (1966) dans Le normal et le pathologique).

L'objectif de l'ETP est d'apprendre à vivre avec la pathologie, et à s'émanciper de la relation de pouvoir assymétrique entre patient et soignant, en apprenant l'autonomie et la responsabilité pour augmenter sa qualité de vie (Fournier, 2018). L'autonomie est une notion intimement liée à la responsabilité. Kant au XVIIIe siècle définit l'autonomie comme la façon d'agir qu'on s'est donné, une règle de la raison, qui peut devenir universelle.

L'autonomie est émancipatrice car elle permet de ne pas être dirigé par quelqu'un. Après avoir été un idéal d'émancipation politique contre les hiérarchies, les aliénations, les normes sociales dans les années 1960, l'autonomie en tant qu'utopie est devenue une norme sociale face à la maissification et à la diversification des publics, et ce sont les institutions qui se mettent à parler d'autonomie et d'apprentissage de l'autonomie (Molénat, 2010). Mais pour Descombes (2014), les règles de l'autonomie ne se trouvent pas au fond de nous mais dans le contexte social et il s'agit d'une dotation de compétences et de capacités qui s'apprennnent. L'autonomie se construit par la socialisation et la collaboration.

  • voir également les propos de Hervé Glevarec sur l'autonomie précoce des adolescents, sous dépendance des ressources économiques des parents, des adolescents qui déploient des sphères d'activité culturelle propres, une autonomie culturelle semi-publique et souvent sédentaire, dans l'intimité de leur chambre et sur Internet. L'autonomie vue par les parents est alors différente de celle concues par les jeunes : pour les uns, il s'agit d'une autonomie professionnelle, fondée sur l'indépendance financière, la capacité à etre mobile et à s'engager familialement ; pour les autres, il s'agit d'une participation culturel, sédentaire, qui conduit à devenir soi, via des outils culturels plus ou moins controlés par les parents.
    Glevarec, H. (2010). Préados, la liberté...en chambre. Sciences Humaines, 11(11), 10-10.

Paul (2012) rappelle que dans l'ETP, deux formes d'autonomie sont présentes dans l'esprit des patients et des soignants : une autonomie à visée émancipatrice fondée sur l'éducation et une autonomie à visée responsabilisante fondé sur une approche juridique. Dans l'ETP, il ne s'agit pas de rendre la personne autonome mais de solliciter son autonomie en s'appuyant sur ses ressources. Il s'agit donc d'adopter une posture d'accompagnement.

  • 3. Diverses pratiques éducatives fondées sur des modèles pédagogiques différents : vers un modèle systémique ?

Giordan (2010b) récapitule la diversité des modèles identifiés identifiés dans les pratiques d'éducation thérapeutique du patient. Pour chacun d'eux, il identifier les avantages et les inconvénients. Centrée essentiellement sur les transmissions de notions et de quelques gestes thérapeutiques, la référence d'un de ces modèles pédagogiques est la référence au biomédical : une maladie est supposée avoir un substrat organique et une cause de nature biologique. L'acteur principal reste le soignant et le bon patient est considéré être le bon observant qui applique et exécute les recommandations et les conseils formulés par le soignant. Pour ces enseignements, c'est le modèle universitaire qui fait référence avec des cours magistraux, accompagnés d'exercices et de travaux pratiques. Face aux maladies chroniques, un plus grand savoir faire va commencer à être enseigné parallèlement aux données sur la maladie et son suivi. On vise alors l'acquisition par le patient de compétences d'auto-soins et d'adaptation pour vivre dans son environnement et modifier celui-ci. Des pédagogies actives sont alors introduites : exposés dialogués, ateliers, études de cas, tables rondes, jeu de rôle, etc..

Ces diverses pratiques s'appuient sur trois grands modèles qui ont des effets différents sur la motivation du patient :

La pédagogie frontale, imitant le modèle universitaire, supossant que l'apprentissage est un simple processus communicationnel comportant un décodage puis une mémorisation. La transmission peut même se réaliser en différé par l'intermédiaire d'un film ou d'une vidéo, ou sous forme dialoguée mais toujours avec du matériel ou des fiches de type transmissif. La relation reste donc frontale.
Ces pédagogies peuvent se révéler très efficaces, mais on réalise que le message n'est entendu que lorsqu'il est attendu, c'est à dire lorsque le soignant et le patient se posent la même question, ont le même cadre de référence et de pensée. Les risques d'incompréhension qui empechent toute transmission sont donc importants, sachant que l'objectif du soignant est la prévention des complications, alors que celui du patient est sa qualité de vie. L'individu va enregistrer ce qui a du sens pour lui, par rapport à l'idée qu'il se fait de ce qu'il a a faire avec ce qui lui est dit. Les risques de démotivation et de découragement sont donc forts.

La pédagogie béhavioriste repose sur le principe d'un conditionnement et il est issu des travaux de Skinner (1904-1990) notamment, reprenant les travau du physiologiste russe Pavlov sur le changement de comportement de l'animal et son conditionnement. Il s'agit de repèrer les réponses positives et négatives, et de réaliser des renforcements pour enrichir le comportement positif, et des remédiations en cas d'obstacle au "conditionnement opérant". Giordan (2010b) estime que les exercices de PNL ou des thérapies comme la Gestalt therapy ou encore les thérapeuties familiales sont issues de cette école de pensée.
Très efficace lors de l'aprpentissage de gestes techniques ou de l'apprentissage de réflexe de santé, cette approche intervient peu sur la motivation. Cette pédagogie s'intéresse aux entrées et aux sorties comportementales, en renonçant à comprendre le mental. Présupposés, croyances, désirs, intentions du patient ne sont pas pris en compte. L'apprentissage, qui est un phénomène complexe et non linéaire, est découpé en unités élémentaires correspondant chacune à un stimulus externe.

La pédagogie constructiviste repose non pas sur la transmission ou le conditionnement mais sur la construction progressive des apprentissages en travaillant avec d'autres par le biais d'expressions et d'activités, d'investigation et de tatonnements. Inspirés des théories philosophiques de la pensée ete des travaux en psychologie des années 1960, par exemple ceux de Piaget ou de Bruner, on considère que pour que l'information soit significante, il faut des ponts cognitifs pour faire des liens et assurer l'intégration de cette information à la structure mentale préexistante . Les schèmes du sujet, sa propre organisation cognitive, sont alors réorganisés par les nouvelles données extérieures. On dira que le sujet les assimile. Et en retour il y aura accomodation lorsque les schèmes de pensée en place se modifient en fonction des circonstances nouvelles (assimilation et accomodation pour Piaget).
Cette pédagogie a l'avantage de favoriser la motivation par le vécu du patient et d'enrichir un apprentissage ou de modifier légèrement certaines croyances. Apprendre procède de l'activité de la personne, et n'est pas le résultat d'une impression ou d'un conditionnement opérant. Mais les informations nouvelles peuvent être des obstacles sur le plan cognitif ou émotionnel, et le patient ne se laisse pas facielment déposséder de ses croyances. Construction et déconstruction ne peuvent résulter que d'intéractions. Et le cadre interprétatif du patient reste son savoir antérieur. La sphère affectivo-emotionnelle (sentiments, passions, désirs, peurs) joue également un rôle déterminant dans l'acte d'apprendre en ETP.

A partir des limites des pédagogies précédentes, la pédagogie systémique a été défini sur trois bases nouvelles :

  1. importance des intéractions multiples centrées sur le patient et élaborés avec le patient, implicant les proches si possibles et intégrant la vie quotidienne, et s'appuyant sur un diagnostic éducatif des besoins, des conceptions et de l'environnement socioculturel du patient ;
  2. prise en compte des dimensions multiples de patient : émotions (peurs, angoisses,...), perceptions et ressentis, regard sur la maladie, son corps et sur le traitement, sur le personnel de soins, sousbassemlent de sa pensée (raisonnement intime, évidences, émotions et sensations corporelles que le patient n'interroge pas), ses projets de vie, son passé éducatif et scolaire (certains ne supportent pas de se retrouver en formation);
  3. mise en place d'un environnement didactique qui permette l'ébranlement des conceptions du patient et accompagner l'émergence de nouvelles conceptions. Cette pédagogie va travailler sur la prise en compte du système de conceptions du patient car toute dissonance cognitive n'est pas assimilée. Il y a donc un barrage à l'apprentissage lié à la structure de pensée. Le patient ne se dépouille pas facilement de ses croyances en santé, malgré les arguments, les illustrations et les expériences illustratives du soignant. L'environnement didaactique favorable peut être un travail en groupe par exemple (voir l'étude de quelques situations rapportées).

L'idée dans ce modèle pédagogique systémique est donc de travailler avec les représentations et les croyances des uns et des autres, sans tenter d'aller contre mais en personnalisant l'approche et en démontrant que la gestion de la balance bénéfice risques est liée direectement à l'auto-contrôle et à la compréhension des symptomes (Giordan, 2010a).

On reconnait également que la perception des risques par le patient et le soignant est une affaire complexe qui ne se limite à la question de la connaissance (Peretti-Watel, 2002 pour les 6 déterminants qui peuvent expliquer notre perception des risques).

La dimension cognitive, qui passe par l'instruction, le dire, le faire, le montrer ne suffit pas à conduire à un changement de comportement et à créer de la motivation. Il semble nécessaire de prendre en compte les conceptions, les affects, les croyances du tissu social sur la pathologie pour penser l'éducation thérapeutique du patient.

  • 4. Du triangle au tétraèdre didactique : patient, soignant, savoirs... et pathologie !

A la confluence de 2 mondes, celui du soignant et celui du patient, avec des attentes différentes (Authier, 2017, p.250-251), l'ETP suppose alors une transposition didactique fondée sur 4 dimensions, dont le rapport à la pathologie (tétraèdre de Authier, 2015), à la place des 3 dimensions traditionnellement utilisées pour appréhender les phénomènes d'apprentissage. Dans l'éducation scolaire, il s'agirait peut etre d'intégrer un autre objet, celui de l'apprentissage, dans le triangle enseignant, élève savoir) :


Triangle pédagogique de Jean Houssaye (2000) adapté à l’ETP,
in Authier et Berger, 2019.

Il est possible de distinguer trois processus :

  • 1-former : qualifié d’institutionnel et non directif (Houssaye, 2000, p. 126). Les élèves doivent s’organiser pour trouver un mode de fonctionnement qui va leur permettre d’acquérir des connaissances.
  • 2-apprendre : le professeur est organisateur et s’efface (Ibid. p. 47).
  • 3-enseigner : qualifié par Jean Houssaye de traditionnel ou magistral actif (Ibid. p. 44). L’organisation est centrée sur les contenus : « Le professeur fait exister le savoir et le savoir justifie le professeur ».


Authier (2017) décrit chacune des faces de son tétraèdre de la manière suivante :

  • Face 1 : Soignant-formateur / Patient / Pathologie : Dans ce cas, le savoir n’est pas pris en considération. De telles interactions s’observent par exemple au sein d’ateliers d’art-thérapie au cours desquels il est rare que des connaissances en lien avec le diabète ou sa prise en charge soient travaillées. Par contre, les soignant tiennent compte du patient et des affects générés par sa pathologie. Remarquons que ce type d’interaction peut également s’appliquer à des conduites de type charlatanisme où aucun savoir reconnu n’est traité.
  • Face 2 : Patient / Pathologie / Savoir : Le patient prend le pouvoir (dans le sens d’empowerment (Lord & Hutchison, 1993)) sur sa pathologie et la nécessaire réorganisation de sa vie. Ceci est favorisé par la littératie en santé. Le soignant n’intervient pas directement mais veille à instaurer un cadre qui permet la construction des connaissances par les patients, le travail de compétences et la gestion des affects.
  • Face 3 : Soignant-formateur / Savoir / Pathologie : Le patient s’efface au profit de la seule prise en charge scientifique et technique de la pathologie, grâce à des savoirs académiques apportés de façon uniforme et décontextualisées par le soignant.
  • Face 4 : Soignant-formateur / Patient / Savoir : Les particularités de la pathologie ne sont plus prises en compte. Les contraintes quotidiennes liées à la pathologie n’entrent pas dans le discours. Il existe une centration sur des savoirs académiques; pas forcément en lien direct avec la pathologie.


L'auteur précise dans les atéliers pédagogiques classiques, les processus sont ceux des faces 3 et 4, alors que dans le cas d'ateliers d'émancipation, visant l'autonomie et la responsabilisation, le processus éducatif est celui soutenu par la face 2.
La face 2 rejoint d'ailleurs la définition que donne Meireu (1997, p.25) de l'éducation comme une relation (1) dissymétrique (2), nécessaire (3) et provisoire (4), visant à l'émergence d'un sujet (5).

  • 5. Les fondements d'une posture d'accompagnement en ETP (Paul, 2012)

En 2018, nous avions proposé un travail de modélisation des postures éducatives en classe de sciences, face à des contestations d'élèves lors de l'enseignement de l'évolution (Urgelli et al., 2018). Nous avions defini alors la posture de la manière suivante :

  • la posture est un schème préconstruit du « penser-dire-faire », que l'enseignant convoque en réponse à une situation ou à une tâche scolaire donnée (Bucheton et Soulé, 2009). Cette attitude mentale guidée par l'histoire sociale, personnelle et scolaire est aussi une manière de tenir sa fonction et d'habiter un positionnement professionnel (Chamla, 2008, cité par Maitre de Pembroke, 2015). La posture dépend des représentations et des systèmes de valeurs de l'enseignant (Paul, 2004), mais également du regard qu’il porte sur l'élève.

Il est important de ne pas négliger le fait que les postures sont protéiformes, instables et évolutives, en fonction des contextes (ressources humaines et matérielles notamment), mais également des resources personnelles. Les personnes (soignant et patient) sont à la fois situées et situantes, et donc en transaction et actives dans l'émergence de la situation de soins (Masciotra et al., 2008 parlent de personnes enactives).

Dans le cadre de l'éducation thérapeutique du patient et des modèles d'éducation à la santé, Paul (2012) est amenée à repréciser l'importance de la notion de posture et insiste sur la posture d'accompagnement. En fonction des représentations de l'apprentissage, entre imprégnation, béhaviorisme et constructivisme, et de la vision du patient (plus ou moins compétent, informé, capable, Balcou-Debussche, 2012), et de la conception de la mission de soignant, l'approche didactique et pédagogique du soignant, vis à vis du patient, et donc sa posture éducative sera différente.

L'accompagnement signifie une relation coopérative et construite, une relation à l'autre contextualtié, et donc une attitude. Cette attitude ou posture est une ressource par la sollicitation du patient, ce n'est donc pas une aide. l'ETP suppose un regard différent sur le patient en se percevant comme compétents réciproquement (parité d'estime) pour atteindre un objectif commun, en définissant les rôles de chacun. Pour le soignant, il s'agit donc d'une remise en question de sa manière d'être et de son rapport au patient considéré comme humain, plutot que comme usager du service public.

  • Conclusion : principes et limites

Pour le soignant, la posture d'accompagnement dans l'ETP suppose l'application de principes et un changement de regard sur la pathologie et sur le patient :

  1. un principe éthique : cette posture est critique et réflexive, par rapport à soi même, elle questionne la violence sur autrui, elle suppose de ne pas faire à la place de l'autre, mais de faire ensemble pour faire évoluer la situation,
  2. un rapport au savoir particulier : l'adoption d'une posture de non savant, d'ignorant, pour favoriser l'intelligence de l'échange loin du surplomb théorique. Il s'agit du constructivisme dialogique, loin de l'idéologie de la compétence et des jeux de pouvoirs. Les communications et les pratiques éducatives médicales ne sont donc plus guidées par un modèle de transposition de savoirs experts inscrit dans l'idéologie de la compétence d'une élite experte, face à un "patient ignorant", supposé a priori en décifit de connaissances (Balcou-Debussche, 2012),
  3. un principe d'écoute dans la négociation et pour la construction d'un sens partagé,
  4. la mobilisation de pédagogies actives : le patient est acteur dans un projet de prise en charge de soi par soi.

Signalons l'existence de limites dans la pratique de l'ETP : sur le long terme, la non persistance de l'engagement du patient et du soignant, la démotiviation du patient et peu de transfert au quotidien (Giordan, 2010a), mais aussi des risques d'instrumentalisation du patient et de charlatanisme, par perte des savoirs, voire du soignant professionnel (Paul, 2012).